Le dossier icon

Le dossier

L'info n°227/01/23

Les migrants, esclaves des temps modernes

Amélie Rodriguez, responsable nationale Migrants CSC, revient sur l’importance du combat syndical en faveur des migrants, avec ou sans papiers.

Propos recueillis par David Morelli

Pourquoi la question migratoire est-elle un sujet syndical?

Les personnes qui arrivent ici sont des migrantes et des migrants, mais aussi des travailleuses et des travailleurs. Ces personnes doivent subvenir à leurs besoins et vont donc travailler dans des chantiers, dans nos maisons, dans l’horeca… Et souvent, si elles n’ont pas un statut de séjour régulier, les employeurs risquent d’abuser d’elles. En tant que syndicat, il est important que l’on assume notre mission essentielle, qui est la solidarité, et qu’on défende tous les travailleurs, qu’ils soient avec ou sans papiers.

Cette exploitation des travailleurs migrants a-t-elle des conséquences sur les travailleurs belges?

Tout à fait. On remarque qu’il y a énormément de travailleurs migrants dans les secteurs en pénurie de main d’œuvre, où les conditions de travail sont très précaires. N’ayant pas d’autres choix pour vivre, ces personnes acceptent des conditions de travail indignes et des salaires tirés vers le bas. Dans ces conditions, cela n’attire pas autant de travailleurs européens détachés, d’autant que les plans de relance dans des pays proches de chez eux créent des emplois. Les travailleurs belges n’acceptent plus de travailler dans ces métiers qui ont des conditions de travail très difficiles et des salaires très bas. Une solution pour remédier à la pénurie consisterait donc à revaloriser ces salaires.


Panneau réalisé à l’occasion d‘une journée organisée par la CSC Migrants.

Au-delà de la question du respect des droits fondamentaux, quel est l’apport positif que peut constituer pour la Belgique ce combat syndical en faveur des migrants?

Il y en a plein! Et cela dépasse largement les aspects «utilitaires» du travail et de l’économie. Outre la découverte et la rencontre des cultures, il y a aussi le fait que la population belge fait de moins en moins d’enfants et est de plus en plus âgée. La migration va être essentielle pour pouvoir payer les pensions. Les migrants peuvent être un vrai apport pour maintenir à flot la sécurité sociale. La CSC Bruxelles a réalisé un calcul: si on régularisait aujourd’hui 100.000 sans-papiers et qu’on leur donnait l’accès à l’emploi avec un salaire moyen, cela rapporterait 65 millions par mois aux caisses de l’État. Aujourd’hui, ces personnes consomment et paient la TVA, mais sont empêchées de cotiser à la sécurité sociale puisqu’elles sont obligées de travailler au noir. Leur permettre un accès au travail leur permettrait de cotiser.

© La CSC Migrants