La réforme n’améliore pas le montant des pensions.
Le gouvernement est loin d’avoir réalisé une vraie réforme des pensions qui améliore concrètement la vie pour des milliers de futurs pensionnés, en particulier des femmes.
D.Mo.
L’accord conclu le 19 juillet durcit les conditions d’accès à la pension minimum via les exigences d’une carrière effective de 20 ans (avec possibilité d’assimilation de cinq années de maladie, des périodes de congé de maternité et de handicap) et de prestations à 4/5e temps (au lieu de 2/3 jusqu’à présent). Un régime transitoire est prévu pour les plus de 54 ans.
Cette réforme n’améliore en rien le montant des pensions. Au contraire, elle dévalorise les périodes assimilées: «Ce gouvernement poursuit l’œuvre de ses prédécesseurs en portant atteinte à la légitimité des périodes assimilées. Il y aurait d’un côté les bonnes périodes qui méritent d’être prises en compte et de l’autre, les mauvaises», explique Youssef El Otmani, du service d’études de la CSC. Ce processus rompt avec la logique de notre système de pension qui considère que les périodes assimilées correspondent largement à des situations que le travailleur n’a pas choisi et doivent donc être assimilées à du travail.
CET ACCORD
REND LE SYSTÈME
DE PENSION ENCORE
PLUS COMPLEXE.
Pour faire passer la pilule, le gouvernement s’est accordé pour que les périodes de travail prestées à 4/5e soient assimilées à un temps plein. Problème: cette mesure ne concerne que les périodes avant 2001 et pour maximum cinq années. Résultat: cette compensation concernera de moins en moins de monde alors que la restriction de l’accès à la pension minimum s’appliquera pour l’avenir.
Un bonus pension, d’un montant de 2 à 3 euros par jour, sera à nouveau accordé, pour une durée de maximum trois ans. Pour l’obtenir, il faudra remplir les conditions d’accès à la pension anticipée ou avoir l’âge de la pension légale. «La CSC s’était opposée par le passé à la suppression du bonus pension. Pourtant, selon des études menées dans d’autres pays, celle-ci n’incite pas à allonger la carrière et constitue en fait un effet d’aubaine», commente l’expert. Par ailleurs, il constate qu’il n’est pas question dans l’accord de l’amélioration de l’accès à la pension anticipée ni de la pénibilité des métiers.
Plus globalement, Anne Léonard, secrétaire nationale, pointe qu’en ajoutant des conditions supplémentaires, l’accord rend le système de pension encore plus complexe sans que cela se traduise par la réalisation de sa finalité: maintenir un niveau de vie décent des futurs pensionnés et pensionnées. Elle regrette également sa logique dogmatique, sans vision sociétale: «Il n’y a pas de réflexion partant des réalités du marché du travail et des objectifs du système. Le fait de réformer l’accès à la pension minimum sans évaluer l’impact sur les pensions des femmes en est un exemple flagrant. Une vraie réforme aurait impliqué une étude en amont. Une réforme devrait permettre aux jeunes une meilleure constitution de droits en pension et devrait assurer aux pensionnés et pensionnées de vivre dignement.» Enfin, elle pointe l’«injustice et l’incohérence» de l’accord: «Pourquoi, par exemple, exclure toutes les périodes de chômage ou limiter l’assimilation des périodes de maladie à cinq ans? Ces choix n’ont aucune base objective. Cet arbitraire les rend difficilement défendables.»
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