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L'info n°2109/12/22

interview

«On va galérer toute notre carrière pour galérer encore plus lors de notre pension»

Isabelle Jacobs, 55 ans, éducatrice spécialisée au Centre hospitalier neurologique William Lennox (Ottignies) témoigne des conséquences de la dernière réforme des pensions.

Propos recueillis par Donatienne Coppieters

«Je suis déléguée et j’ai tous les mandats dans l'hôpital. Ces derniers temps, je suis beaucoup interpellée par mes collègues qui sont épuisées. Dernièrement, l’une d’entre elles est venue me dire ‘Isabelle, moi je diminue mon temps de travail à 50% parce que je n’en peux plus, c’est intenable.’ Le problème est qu’il y a une importante pénurie de personnel et que la charge de travail est encore pire pour celles qui sont là. Quand je l’ai informée des conséquences sur sa pension, elle m’a dit d’un air dépité: ‘Je vis aujourd’hui. Pour la pension, je ne sais pas si finalement il nous restera quelque chose, alors je verrai…’ Les gens sont tellement mal dans leur boulot, dans leur charge de travail qu’ils ne se projettent plus dans l’avenir. Il faut des solutions pour pouvoir mener sa carrière jusqu'à la fin, avoir des pensions respectables et qu’on puisse vivre dignement.

Le crédit-temps de fin de carrière a été reporté à 60 ans, mais ce n’est pas possible. Le métier d’infirmière est fatigant physiquement et mentalement. Elles ont, en plus, les responsabilités de gérer les médicaments, les traitements, plein de choses déléguées par les médecins. S’il y a des erreurs, ça leur retombe dessus.

Mais dans les hôpitaux, il y a aussi des aides-soignantes, des brancardiers, des éducateurs, du personnel de nettoyage qui ont tous des horaires compliqués. Ce sont majoritairement des femmes qui occupent ces postes. Ce dont, il faut se rappeler quand même, c'est que l’ensemble des métiers de l’hôpital sont dits ‘essentiels’ et que, en 2020 pendant le Covid, on applaudissait tout le monde. Il est grand temps que les métiers de soins soient reconnus comme des métiers pénibles pour avoir des fins de carrière acceptables. Travailler à temps plein jusque 67 ans dans ce domaine, ce n’est pas possible!»


Interview d'Isabelle, déléguée CSC