Les violences faites aux femmes, c’est l’affaire de tous!
Ayla Serbest, collaboratrice égalité des genres à la CSC.
La manifestation contre les violences faites aux femmes a eu lieu le 27 novembre. Ayla Serbest, collaboratrice «égalité des genres» au sein de l’équipe animation de la CSC, fait le point sur cette violence sexiste et sur le rôle que les déléguées et délégués peuvent jouer en entreprise.
Propos recueillis par Donatienne Coppieters
Dans le monde, une femme sur quatre est victime de violences conjugales et 64% de femmes sont assassinées par leur partenaire intime ou un membre de leur famille. Nous devons nous mobiliser aujourd’hui pour que le monde de demain soit plus sûr! Depuis le lancement du mouvement #MeToo en 2017, 152 femmes ont été tuées en Belgique. En 2022, il y a déjà eu 20 féminicides (1). Des femmes qui meurent par le simple fait «d’être une femme». Personne ne peut ignorer aujourd’hui l’étendue des violences machistes que toutes les femmes connaissent au cours de leur vie sous des formes multiples: violences conjugales, sexuelles, économiques, psychologiques, institutionnelles, dans la sphère privée comme dans l’espace public. Grâce aux différentes mobilisations (grève des femmes du 8 mars, dénonciation des féminicides, manifestation Mirabal, mobilisations locales…), nous pouvons constater à quel point notre solidarité est notre force!
La lutte contre toutes les formes de violences machistes est une responsabilité collective, qui ne doit pas reposer que sur les épaules des femmes. Il est temps que les hommes et les pouvoirs publics prennent la mesure de leurs rôles dans ces violences et agissent en conséquence pour, eux aussi, contribuer activement à y mettre fin.
Les politiques d’austérité, le racisme et le sexisme continuent à faire reculer les droits fondamentaux de la majorité de la population. Il est temps de renverser radicalement la vapeur si on veut réellement se donner les moyens de garantir l’autonomie et la sécurité de toutes les femmes avec ou sans papiers, avec ou sans emploi, quelle que soit leur origine, leur âge ou leur orientation sexuelle.
1 femme sur 4
est victime de violences conjugales
Comme syndicat, il est essentiel de se saisir de cette question car nos affiliés et nos collègues en entreprise ont besoin de nos délégués et permanents, pour les défendre, pour construire des entreprise qui soient des lieux de travail sécurisés et pour conserver leur autonomie économique et financière - donc leur travail - même lorsqu’elles sont victimes de violences sexistes ou sexuelles. Depuis des années, nous menons avec les délégations syndicales un travail de sensibilisation car nous considérons que les violences sexuelles et sexistes dans les entreprises sont aussi une responsabilité syndicale. Que ces violences se passent entre collègues, ou qu’il s’agisse d’une travailleuse victime de violences domestiques conjugales, cela peut avoir des conséquences sur leur travail: problèmes relationnels, problèmes d’attention, fatigue… Or, il est important que les femmes gardent leur travail afin de conserver leur autonomie économique et financière. Par ailleurs, pour les femmes victimes de violences domestiques conjugales, se rendre sur leur lieu de travail constitue un vrai bol d’air pour faire diminuer la pression, la généralisation du télétravail constituant un problème à cela. Les déléguées et délégués peuvent jouer un rôle important dans l’identification de ce que vivent leurs collègues et dans leur soutien.
En juin 2019, l’OIT a adopté la convention n°190 qui reconnait le droit de toute personne à un monde du travail exempt de violence et de harcèlement. À ce jour, la Belgique n’a toujours pas ratifié cette convention! Comme nous sommes en Belgique, elle doit d’abord être ratifiée par les différents niveaux de pouvoir. C’est pourquoi nous nous activons via nos différents mandats pour faire pression et montrer l’urgence de faire adopter au plus vite cette convention afin que la Belgique puisse jouer un rôle de premier plan dans la lutte pour une plus grande égalité de genre.
Nous avons des lois, nous savons où agir. Il faut maintenant donner des moyens pour lutter contre les violences et appliquer ces lois pour qu’on ne doive plus, l’an prochain, citer une liste de prénoms des femmes victimes de féminicides en 2023 dans notre pays.
Sur le sujet des violences à l’égard des femmes, lire également le dossier publié dans L’Info n°20.
(1) Recensement par le blog http://stopfeminicide.blogspot.com