Dans une chocolaterie, la hausse des prix de l’énergie pèse pour deux fois plus que celle de 9,6% d’indexation.
La CSC déconstruit, chiffres à l’appui, un préjugé tenace sur les salaires en Belgique.
Parmi les revendications adressées au gouvernement le 9 novembre dernier, les syndicats exigent que les employeurs cessent d’attaquer l’indexation automatique des salaires. Du côté patronal, on affirme en effet qu’elle met à mal la compétitivité des entreprises belges. La CSC Alimentation et Services (A&S) a déconstruit cette affirmation en sortant sa calculette dans l’industrie boulangère. Si l’on observe les chiffres, on voit que la hausse des coûts de l’énergie pèse trois fois plus que les indexations.
Sur la base des chiffres de la fédération des boulangers Bakkers Vlaanderen1, la CSC A&S a calculé que l’énergie a contribué à une hausse de 13% des coûts de production totaux d’un pain, contre 3,9% pour les indexations des salaires 2022 passées et à venir. «Si une entreprise boulangère a des coûts pour 100 millions d’euros, la hausse des coûts de l’énergie pèse pour 13 millions d’euros en plus. La hausse des salaires liée à l’indexation de 9,6% lui coûtera 3,9 millions d’euros de plus… soit trois fois moins!» analyse Gaëtan Stas, secrétaire général de la CSC A&S.
La hausse des coûts
de l’énergie pèse
trois fois plus que les indexations.
Dans une chocolaterie ou une fabrique de gaufres, la hausse des prix de l’énergie pèse pour deux fois plus que celle de 9,6% d’indexation. Mais l’industrie alimentaire est intensive en main-d’œuvre. La plupart des industries lourdes ont des frais de personnel nettement plus faibles. Les indexations salariales devraient donc y peser encore moins. «À l’inverse, les entreprises de services comme le nettoyage ou l’Horeca ont des frais de personnel plus importants. Mais ce sont aussi des secteurs où il n’y a pas vraiment de compétitivité à avoir vu qu’on ne peut délocaliser un nettoyeur ou une barmaid», continue Gaëtan Stas.
Le principal problème de l’industrie réside donc dans la hausse des prix de l’énergie… qui est source de bénéfice pour certains fournisseurs d’énergie. «Ceux qui ont vraiment à cœur d’alléger la facture des entreprises devraient plutôt demander un blocage des prix de l’énergie. Et celui-ci peut être financé par une taxe sur les surprofits des secteurs qui bénéficient de la crise» développe le secrétaire général. «Les dividendes versés par les grandes entreprises belges à leurs actionnaires ont augmenté de 70% en Belgique entre avril et juillet 2022. On ne peut pas demander que les travailleurs baissent leur pouvoir d’achat avec un saut d’index alors que ceux qui ont les épaules les plus larges profitent de la crise».
Près de la moitié des travailleurs n’ont pas encore vu leur salaire indexé en 2022. Pour un ouvrier de l’industrie alimentaire, c’est 2.050 euros brut perdus depuis le début de l’année. «On retourne des dizaines d’années en arrière au niveau du pouvoir d’achat. Garantir un salaire correct pour tout le monde, c’est notre priorité. C’est pourquoi nous manifesterons pour le pouvoir d’achat au cours des prochains mois», conclut-il.
1. Début 2022, les prix de l’énergie pesaient pour 5% des coûts de production d’un pain, là où les frais de personnel comptaient pour 43%.
© Patrick Lefevre/Belpress.com