L'essentiel icon

L'essentiel

L'info n°1722/09/2023

«Nous allons devoir forger des alliances»

Marc Leemans, qui quittera sa fonction de président fin décembre, commente les principales priorités de la CSC pour 2023-2024.

B. Van Vaerenbergh (ad. D.Mo.)


Quelles sont vos priorités pour cette année sociale?

Quatre priorités domineront notre action: les élections sociales, les élections politiques, la préparation de notre congrès national en 2024 et la transition de la CSC.

Mais je dois également citer le changement climatique et son impact. Cet été, la Belgique a été épargnée, mais le monde entier a été frappé par une extrême sécheresse, une chaleur sans précédent et de graves feux de forêt. [Ce défi] doit dicter l’agenda politique – et également celui de la concertation sociale – des prochaines années, à tous les niveaux. Nous n’attendons pas grand-chose de la conférence nationale des 8 et 9 novembre sur la transition juste. Nous pouvons seulement essayer d’agir au mieux afin de contribuer à déterminer ce qui se passera après les élections politiques


2024 sera en effet une année électorale. Quels sont les enjeux les plus importants?

Face à la montée de l’extrême droite en Belgique, surtout en Flandre, et en Europe, la Confédération européenne des syndicats (CES) a décidé d’en faire une lutte prioritaire. Il en va de même pour la CSC. En effet, les travailleurs n’ont rien à espérer de ce genre de partis. On le voit dans les votes de leurs parlementaires: ils se sont opposés au salaire minimum européen et ils ont approuvé la Loi sur la norme salariale. C’est révélateur. En même temps, ils cherchent aussi à «casser» les syndicats.

La lutte contre l’extrême droite est une priorité syndicale.

Le gouvernement a pu trouver un accord sur une réforme des pensions, mais pas sur une réforme fiscale…

En effet, la fiscalité juste est apparemment une revendication inacceptable pour certains partis de la coalition gouvernementale. Pourtant, tous disent que le salaire poche des gens doit augmenter. Mais au moment de prendre les grandes décisions, ils se taisent dans toutes les langues.

Le fait que la coalition gouvernementale n’ait pas réussi à trouver un accord sur une réforme fiscale n’est pas seulement une question d’équité: comment mettre en œuvre l’augmentation du salaire minimum? Cette augmentation, fruit d’un accord conclu au sein du Groupe des dix, est liée à deux mesures d’accompagnement: une compensation intégrale de l’augmentation du coût salarial pour les employeurs, et une augmentation de l’avantage en brut pour les travailleurs, jusqu’à 50 euros en net. Le gouvernement allait régler tout cela par le biais de la réforme fiscale. Or, celle-ci n’aura pas lieu. Nous ne manquerons pas de demander au gouvernement de s’expliquer en détail au cours des prochaines semaines.

Dans ce contexte compliqué pour les syndicats, comment continuer à avancer?

L’interdiction de manifester, Delhaize, Ryanair… Les conflits que nous connaissions avant les vacances ne sont toujours pas résolus. Nous allons devoir forger des alliances, dans la mesure du possible. Avec les autres syndicats, tout d’abord, mais aussi avec des coalitions plus larges de groupes qui partagent nos idées sur des revendications spécifiques. En ce qui concerne la réforme de la loi sur la norme salariale, nous avons déjà commencé à étudier, avec la FGTB, les façons de traiter concrètement ce dossier. Il en va de même pour la défense de l’index. Notre arsenal d’arguments pour défendre l’indexation automatique des salaires ne cesse de s’étoffer. D’autant plus que la prétendue «spirale salaires-prix» déclenchée par l’indexation n’est qu’un mirage. Le vrai problème semble plutôt être celui d’une «spirale bénéfices-prix», c’est-à-dire une inflation nourrie par l’appât du gain.


© Thomas Geuens