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L'info n°77/04/23

Il est difficile de faire changer les habitudes

Les aide-ménagères sont particulièrement exposées aux perturbateurs endocriniens présents dans de nombreux produits d’entretien. Béatrice, déléguée syndicale et accompagnatrice chez Logi9, une société de titres-services de la région liégeoise, forme les nouvelles engagées et tente de les sensibiliser aux alternatives naturelles à ces produits.

Propos recueillis par David Morelli

Comment avez-vous été amenée à vous intéresser à la toxicité des produits d’entretien?

Au début des années 2000, mon médecin a découvert que j’avais les voies respiratoires brûlées, à cause de l’utilisation répétée d’un produit contre les moisissures, qu’un client voulait absolument que j’utilise. Par ailleurs, en 2017, j’ai eu un cancer du sein alors que je n’avais aucune prédisposition génétique ni antécédent familial. Suite à une séance d’informations organisée par la CSC de Liège en 2019, j’ai découvert les dégâts et les séquelles qu’un usage très régulier de certains produits d’entretien pouvait causer, et j’ai fait le lien avec mon cancer. Lors de cette réunion, j’ai signalé mon intérêt pour cette question et le fait que la société dans laquelle je travaille souhaitait mettre en place des ateliers de confection de produits naturels à l’attention des travailleuses. Cette formation est désormais incluse dans le système de formations légales.

Travaillez-vous avec des produits naturels?

Nous avons une liste de produits alternatifs et de recettes naturelles pour nettoyer une maison: des produits à base de vinaigre pour les sanitaires, des alternatives au désinfectant, des recettes pour faire du gel WC ou du liquide vaisselle. Cette liste et ces recettes sont mises à disposition des clients.

Comment les clients réagissent-ils?

Lorsque j’accompagne les travailleuses sur leur lieu de travail pour une formation ou un perfectionnement, j’explique au client les dangers des produits toxiques qui remplissent souvent leurs armoires. Je leur donne des informations sur les prix, souvent moindres, des alternatives naturelles. Certains sont réceptifs, d’autres sont réticents ou doutent de l’efficacité des produits. Il est difficile de faire changer les habitudes.

La direction soutient-elle les travailleurs?

Chez Logi9, nous avons le droit de refuser d’aller chez un client qui exige l’utilisation de produits toxiques. Je constate par ailleurs que, même s’il n’y a pas encore de législation en la matière, de plus en plus de sociétés font signer aux clients un document mentionnant des produits qui ne peuvent pas être utilisés. Les choses avancent dans le bon sens en la matière.

Vos collègues sont-elles sensibles à cette question?

Une majorité de travailleuses accrochent à cette logique et utilisent désormais des produits naturels, mais toutes n’y adhèrent pas. Pourtant, elles sont en contact du matin au soir avec ces produits. On continue néanmoins les efforts de sensibilisation en rappelant régulièrement l’importance de l’utilisation des produits naturels dans la newsletter envoyée au personnel.

© Karolien Coenen