La clarification de la question du genre dans la loi permet d’éviter des problèmes d’interprétation.
Le racisme et la discrimination sont incompatibles avec la vision de la CSC. Dans la pratique, malheureusement, ces phénomènes sont encore bien trop fréquents. L’extension de la loi sur le genre et l’adaptation de la loi anti-discrimination améliorent désormais la protection dans l’entreprise.
Amélie Janssensi
Une adaptation apportée à la loi sur le genre du 10 mai 2007 remplace l’ancien critère de base «sexe» par onze critères protecteurs. La discrimination dans l’entreprise sur la base d’un de ces critères est donc interdite et punissable.
La loi de 2007 sur le genre interdisait la discrimination sur la base du sexe. Dans la pratique, cela donnait parfois lieu à des problèmes d’interprétation. La formulation actuelle devrait changer la donne.
Depuis ce 19 janvier 2023, la discrimination sur la base d’un de ces critères est interdite: le genre, la grossesse, la procréation médicalement assistée, l’accouchement, l’allaitement, la maternité, les responsabilités familiales, l’identité de genre, l’expression du genre, les caractéristiques sexuelles et la conversion sexuelle.
L’employeur qui se rend coupable de discrimination risque une amende
et/ou la prison.
Le nouveau critère de «responsabilités familiales» couvre notamment les congés spécifiques qui offrent aux travailleurs la possibilité de combiner vie professionnelle et vie familiale ou soins. Prendre un congé de maternité, un congé parental, un congé d’adoption, un congé pour soins ou un congé pour motif impérieux ne peut donc amener à être victime de discrimination.
Par exemple, si le personnel s’est vu accorder de nouveaux avantages durant l’absence du travailleur, dont l’intéressé devrait bénéficier, alors ces avantages doivent également lui être octroyés. Le travailleur a aussi le droit d’être réintégré dans la même fonction. Si ce n’est plus possible, l’employeur doit lui proposer une fonction équivalente ou comparable.
L’employeur qui se rend coupable de discrimination envers une personne risque une peine d’un mois à un an de prison, une amende de 400 à 8.000 euros, ou les deux.
Un témoignage formel n’est plus requis pour bénéficier d’une protection en tant que témoin d’une discrimination. Il suffit d’un signalement auprès de l’Institut pour l’égalité entre les femmes et les hommes (IEFH), d’Unia (Centre interfédéral pour l’égalité des chances), ou d’une organisation de défense des intérêts.
Les différentes lois anti-discrimination prévoyaient déjà une protection pour les personnes qui témoignaient de pratiques discriminatoires. Mais elles devaient pour cela déposer un témoignage formel.
Ce qui a changé la donne, c’est un litige relatif au licenciement d’une responsable de magasin, qui avait défendu la cause d’une candidate enceinte. En effet, après un entretien d’embauche, la responsable du magasin avait émis le souhait de procéder à l’engagement.
Cependant, devant le refus des ressources humaines, elle avait informé la candidate que l’emploi lui était refusé en raison de sa grossesse. Celle-ci avait alors introduit une plainte auprès de l’IEFH. Un an plus tard, c’était au tour de la responsable du magasin d’être licenciée.
Elle a alors également déposé plainte auprès de l’Institut, estimant qu’elle perdait son emploi parce qu’elle avait dénoncé une discrimination. La candidate a reçu rapidement des dommages-intérêts. Pour la responsable du magasin, la situation était plus compliquée: en vertu de la législation belge, un témoignage formel était indispensable pour que le témoin soit protégé. Le dossier a alors été transféré à la Cour européenne de Justice, qui a jugé en 2019 que d’autres personnes pouvaient également être protégées, et qu’un témoignage formel n’était pas nécessaire (arrêt Hakelbracht, 2019, C 404/18).
Trois ans après le jugement de la Cour, cette condition a finalement été supprimée des lois anti-discrimination. Outre les victimes de discrimination, d’autres personnes sont ainsi mieux protégées. Une contribution active est toutefois nécessaire. Une personne qui prend simplement connaissance des faits mais qui n’utilise pas cette connaissance en faveur de la victime n’est pas protégée. La protection s’applique, par exemple, lorsqu’une personne envoie la victime d’une discrimination présumée vers un délégué syndical, ou encourage cette personne à porter plainte. Celui qui témoigne en faveur de la victime d’une discrimination présumée en invoquant son comportement en tant que travailleur bénéficie également d’une protection.
Pour en savoir plus:
www.lacsc.be
Une travailleuse souffrant d’une affection dentaire héréditaire a reçu des dommages-intérêts après avoir été licenciée lors de son premier jour de travail.
Une dame pose sa candidature pour un emploi chez un courtier en assurances, en août 2020 – en pleine période Covid, tout le monde porte donc un masque. Cette dame souffre d’une affection dentaire, et ses dents se cassent facilement. L’opération requise pour lui placer une prothèse dentaire complète a déjà été reportée deux fois, à cause du Covid puis en raison d’une grossesse. Au cours de son premier jour de travail, alors qu’elle boit un café avec son patron, la travailleuse retire brièvement son masque. Elle est licenciée sur le champ, et reçoit un message lui conseillant de «chercher un emploi sans contact avec la clientèle».
Avec l’aide d’Unia, elle dépose alors une plainte au tribunal du travail d’Alost. Celui-ci a jugé récemment (le 8 février 2023, ndlr.) qu’un employeur ne peut pas discriminer un travailleur sur la base d’une affection physique, corporelle ou héréditaire, de la taille, d’excroissances, du poids ou d’un handicap. Les gérants sont condamnés à payer six mois de salaire brut à la plaintive.
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