Le dossier

L'info n°0829/04/22

Plus de droits pour votre dos!

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Le 28 avril avait lieu la Journée mondiale de la sécurité et la santé au travail. À cette occasion, la CSC a souhaité mettre l’accent sur la problématique des troubles musculosquelettiques, le problème de santé lié au travail le plus fréquemment mis en avant par les travailleurs.

Maarten Hermans

Lumbago, hernie, syndrome du canal carpien, tendinite, arthrose… Toutes ces maladies, regroupées sous le terme générique de “troubles musculosquelettiques” (TMS), se rapportent à des problèmes similaires sur le plan médical, qui portent un nom différent en fonction de l’endroit du corps où ils apparaissent: muscles, articulations, tendons, ligaments ou nerfs.

Cette déclinaison des TMS, sous un aussi grand nombre de noms, occulte le fait que cette problématique est répandue et que ces différentes maladies sont étroitement liées à des facteurs de risques au travail.

Il s’agit autant de facteurs de risques physiques (gestes répétitifs, soulèvement de charges lourdes, postures prolongées assises ou debout…) que de facteurs de risques organisationnels.

Lorsque la manière dont le travail est organisé par l’employeur  amène à travailler sous pression, et ne  permet pas de décider de la manière dont vous exécutez concrètement vos tâches, la combinaison entre les facteurs de stress physiques et psychologiques augmente sensiblement le risque de TMS.

Quelle est l’ampleur du problème?

Que nous nous basions sur les problèmes de santé de l’ensemble de la population, des travailleurs, des personnes en incapacité de travail ou des malades de longue durée, les troubles musculosquelettiques apparaissent toujours en tête de liste.

En 2020, un peu plus de la moitié (54%) des travailleurs belges confrontés à un problème de santé lié au travail ont indiqué souffrir de TMS… Des chiffres élevés qui ne s’améliorent pas au fil des années. Leur persistance montre que les mesures actuelles de prévention des TMS sont clairement insuffisantes. Compte tenu du lien étroit entre le contexte de travail et les TMS, et le grand nombre de travailleurs qui en sont victimes, il n’est pas étonnant que les TMS constituent une cause importante d’absence pour cause de maladie.

Une enquête réalisée récemment par la Mutualité chrétienne, auprès de travailleurs en incapacité de travail, a montré que les TMS représentent la principale cause d’incapacité de travail (47%). Parmi ce groupe de travailleurs en incapacité de travail, ce sont surtout les malades de longue durée qui sont mis en avant dans le débat public de ces dernières années. Ce groupe est très important et a doublé en moins de vingt ans, ce qui illustre l’importance de renforcer la politique de prévention au travail, comme élément d’une stratégie plus générale pour réduire le caractère pathogène du travail. Une augmentation qui s’explique principalement par le vieillissement et la féminisation du groupe des travailleurs, ainsi que par les problèmes croissants de TMS et de burn-out. Au lieu de prendre les mesures politiques structurelles nécessaires pour faire face à ces défis de qualité du travail tout au long de la carrière, les responsables politiques semblent actuellement vouloir surtout culpabiliser et sanctionner les malades de longue durée.

Les TMS représentent la principale cause d’incapacité de travail.


De nombreux travailleurs
du secteur de la construction souffrent
de TMS.

Aucun type d’emploi n’est épargné par les TMS

Pratiquement tous les types d’emploi peuvent inclure des facteurs de risques qui favorisent les TMS. Les secteurs où un pourcentage en moyenne plus élevé de travailleurs indique souffrir d’un ou plusieurs problèmes de TMS, sont l’agriculture et la construction (± 67%), suivis par les soins de santé et l’industrie (± 63%). Selon l’enquête de la Mutualité chrétienne, les travailleurs en incapacité de travail qui exercent principalement des tâches manuelles mentionnent deux fois plus souvent les TMS comme affection principale à l’origine de leur incapacité. Cette inégalité est encore plus prononcée parmi les malades de longue durée. Dans le groupe des 150.000 malades de longue durée souffrant de TMS, 103.000 ont un statut ouvrier. D’autres groupes de travailleurs le groupe des femmes et des travailleurs d’origine étrangère ont également un risque relativement plus élevé de TMS. Ce risque accru de TMS est lié au fait qu’ils occupent en moyenne davantage d’emplois avec plus de facteurs de risques de TMS. La lutte contre les facteurs de risques de TMS va améliorer la santé d’un groupe important de travailleurs, et plus spécifiquement d’ouvriers, de femmes et de travailleurs d’origine étrangère. Il est frappant de constater que plus les travailleurs ont des difficultés à joindre les deux bouts dans leur ménage, plus ils souffrent de TMS.

Le travail qui rend malade

Si l’on veut moins de travailleurs atteints de TMS, moins de malades de longue durée et des carrières plus longues, il faut s’attaquer à l’organisation de ce travail pathogène. Tant que nous n’y parviendrons pas, les employeurs pourront continuer à répercuter les coûts de ce travail pathogène sur la sécurité sociale et sur la santé des travailleurs. les travailleurs en situation de précarité ou de faiblesse sur le marché du travail sont encore plus contraints de supporter l’impact invalidant du travail pathogène pour leur dos, leurs poignets ou leur cou.

Dans ce contexte, il est important pour la CSC de continuer à lutter contre l’organisation du travail pathogène et de viser  une participation effective et contraignante des travailleurs sur les questions d’ergonomie. Une première étape pour y parvenir est de renforcer la législation sur le bien-être.

Combler les lacunes de la législation sur le bien-être

Actuellement, nous devons nous contenter d’un certain nombre de dispositions légales fragmentées, telles que des articles sur les vibrations, la manipulation manuelle de charges ou le travail sur écrans. Compte tenu de l’ampleur des TMS, ces éléments ne permettent pas, dans la pratique, d’élaborer une politique de prévention efficace en matière d’ergonomie.

Le plan d’action national sur le bien-être, au travail pour la période 2022-2027 annoncé par le ministre du Travail et de l’Économie, M. Dermagne, comprend explicitement l’objectif d’étudier comment élaborer un cadre juridique concret pour la prévention des TMS. La CSC soutient non seulement cet objectif mais a même des propositions concrètes sur ce à quoi devrait ressembler un cadre juridique efficace.

54%

des travailleurs belges confrontés
à un problème de santé lié au travail ont indiqué souffrir de TMS.

La CSC s’engage pour une meilleure protection des travailleurs

Renforcement de la loi sur le bien-être afin de mieux protéger les travailleurs.
Mesures d’accompagnement et initiatives politiques: il est urgent que les troubles musculosquelettiques soient reconnus comme une maladie professionnelle.
• Prévention: grâce à la participation des travailleurs et aux mesures préventives, il convient de prêter attention aux risques et à leur prévention sur chaque lieu de travail.
Une approche du problème de fond: investir dans les emplois faisables et adapter l’organisation du travail à l’origine des maladies.