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L'info n°1920/10/2023

«Les États n’ont rien à gagner dans ce système d’arbitrage»

La Plateforme pour un commerce juste et durable, dont la CSC est membre, estime que le Traité sur la charte de l’énergie (TCE) met en péril la transition écologique initiée par le Green Deal. Présentation d’un anachronisme démocratique dangereux et coûteux. 

      

David Morelli 

    

Signé en 1994, l’objectif du TCE était de protéger les entreprises européennes qui investissaient dans le secteur de l’énergie, juridiquement instable, des États de l’ex-bloc soviétique. Il donnait la possibilité de contourner les juridictions nationales pour attaquer directement les États devant des arbitres privés, grâce à la clause «ISDS»1 d’arbitrage entre investisseur et État. Cette clause peut être actionnée en cas d’expropriations directes, comme des nationalisations arbitraires, ou «indirectes», c’est-à-dire toute mesure (sociale, environnementale…) qui risquerait d’entraîner une réduction des profits escomptés par le secteur privé.

Menaces

En 2023, la donne a changé. Dans un contexte de lutte contre le changement climatique, la protection des investissements du TCE est un obstacle majeur à l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 et à la lutte contre la précarité énergétique. En effet, la menace d’une action en arbitrage par les entreprises du secteur de l’énergie risque de faire renoncer des États à prendre ou appliquer des mesures visant, par exemple, l’abandon des combustibles fossiles, la suspension de projets pétroliers ou la régulation des prix de l’énergie. Plusieurs pays européens ont ainsi été contraints de revoir à la baisse leurs ambitions en matière de climat ou ont été sanctionnés financièrement au motif qu’ils mettent en péril la valeur des investissements dans les énergies fossiles. Cette clause a déjà permis aux entreprises d’obtenir des centaines de millions d’euros de dédommagement, aux frais des contribuables d’États soucieux d’atteindre les objectifs de décarbonation, mais adhérents au Traité. Pour la Plateforme pour un commerce juste et durable, «les États n’ont rien à gagner dans ce système d’arbitrage». Elle dénonçait par ailleurs en juin dernier l’illégalité de la situation au regard du droit européen.

Sortir du Traité

Constatant l’incompatibilité du TCE, même réformé, avec la législation européenne, la Commission européenne étudie les possibilités d’en sortir. Cela ne fait pas l’unanimité parmi les États membres. Trois options sont étudiées; pour la CSC et la Plateforme, la sortie du Traité par l’UE et les États membres est favorisée. Elles demandent d’ailleurs que la Belgique prenne position au sein du Conseil de l’UE en faveur de la position proposée par la Commission: se retirer collectivement du TCE. Cette sortie, pour la Plateforme, doit être «accompagnée d’un accord qui neutralise l’ISDS et la clause de survie et d’une politique de coopération en matière de commerce extérieur et d’énergie» qui, entre autres, «maintient et renforce le niveau actuel d’approvisionnement énergétique nécessaire à la réindustrialisation verte de l’Europe et donc à la transition écologique et à l’emploi».

Les représentants de la plateforme concluent que «le TCE est un obstacle de taille dont les effets négatifs sur la transition écologique doivent être levés au plus vite». 

1. Cette clause, en vertu de laquelle les investissements sont protégés par le traité pendant 20 ans après la sortie, est l’un des principaux obstacles à cette option.

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Le TCE est un obstacle de taille, aux effets négatifs sur la transition écologique.