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L'info n°1911/11/22

Europe Feu vert historique à la directive salaire minimum


En Europe, 7 travailleurs sur 10 au salaire minimum ont des difficultés à boucler le mois.

Le 4 octobre dernier, la première législation européenne sur les salaires minimums adéquats a été adoptée.

David Morelli

En Europe, sept travailleurs sur dix, rémunérés au salaire minimum, témoignent de difficultés à boucler les fins de mois. Dans le même temps, la couverture par la négociation collective a diminué dans 22 des États membres de l’UE. Plus globalement, les inégalités salariales continuent de croître en Europe. Dans ce contexte, l’adoption d’une directive ambitieuse concernant l’instauration de «salaires minimums adéquats» en Europe constituait un enjeu important pour avancer dans la construction d’une Europe plus sociale.

Dans une carte blanche publiée en février dernier dans le journal Le Monde, huit membres de la Confédération européenne des syndicats (CES), parmi lesquels Marie-Hélène Ska, secrétaire générale de la CSC, appelaient à une directive et à une négociation collective la plus ambitieuse possible: «Cette directive doit imposer aux États membres où le salaire minimum légal existe de le fixer à des niveaux décents pour que chaque travailleur et travailleuse puisse vivre dignement de son travail en Europe. Tout en préservant les bonnes pratiques nationales déjà en vigueur dans certains pays garantissant l’autonomie des partenaires sociaux, la directive doit aussi imposer aux États membres de définir avec [eux] les mesures nécessaires pour développer et renforcer la négociation collective dans tous les pays européens.» Il existe en effet un lien entre la couverture par la négociation collective et la hauteur des salaires: plus la couverture est élevée, plus les salaires sont élevés.

Le texte établit un cadre pour que les États membres favorisent la concertation sociale. 

Établissement d’un cadre

Deux ans après la proposition de la Commission européenne, le Conseil pour les affaires économiques et financières a adopté la directive sur les salaires minimums adéquats. Cette directive oblige les pays de l’UE à s’assurer que leur salaire minimum légal national permet un niveau de vie décent.

Le texte n’instaure pas un salaire minimum européen mais établit un cadre pour que les États membres favorisent la concertation sociale. Cela, entre autres, en vue de rehausser les salaires minimaux et d’assurer, dans chaque État, un niveau de vie décent. Les État qui disposent d’un salaire minimum légal devront s’assurer qu’il est «adéquat» avec, comme valeur de référence indicative, 60% du salaire médian brut ou 50% du salaire moyen brut. Par ailleurs, la directive exige que des plans d’action nationaux soient établis pour porter la couverture en matière de négociation collective sur le marché du travail à 80%. Cela devrait permettre un renforcement des syndicats.

Un effet d’entrainement

Quid de la Belgique qui n’a pas de salaire minimum légal? Dans notre pays, la fixation des salaires minimums repose (quasi) exclusivement sur la négociation collective. La démarche européenne pourrait avoir un effet d’entraînement sur la question de l’adéquation du salaire minimum interprofessionnel. L’adoption d’une directive européenne constitue un outil supplémentaire dans notre lutte contre la politique de modération salariale qui a des conséquences désastreuses sur la capacité à négocier collectivement et, par extension, à promouvoir la négociation collective. La Belgique devra transposer le texte dans les deux ans.

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