Faillite de Van Hool: et maintenant?
Un parking et des bâtiments déserts. Un grand hall, c’est tout ce qu’il reste après la faillite du constructeur de bus et d’autocars Van Hool à Koningshooikt (province d’Anvers). Au temps de sa splendeur, Van Hool occupait 2.500 travailleurs. C’était le principal pourvoyeur d’emplois de la région. Aujourd’hui, les bus ont disparu. Il ne reste qu’une cinquantaine de chaises et une vingtaine de prestataires de services, permanents et accompagnateurs de la CSC pour la recherche d’un emploi. En neuf jours, ils ont aidé quelque 1.700 ouvriers et employés à accomplir les formalités administratives liées à la faillite.
Bram Van Vaerenbergh
Le centre de services temporaire installé chez Van Hool.
Le showroom de Van Hool accueillait jadis les plus beaux modèles du constructeur belge de bus et d’autocars. La fête du personnel y était organisée tous les cinq ans. Aujourd’hui, plus personne n’a le cœur à la fête. Le hall accueille plus de 1.700 affiliés de la CSC concernés par la faillite. Ils viennent régler les formalités administratives. Après l’annonce de la faillite, les syndicats ont dû réagir rapidement: la FGTB, la CGSLB, mais surtout la CSC, qui comptait quelque 1.700 affiliés chez Van Hool. Pour éviter que les centres de services ne soient submergés – et pour centraliser les demandes –, les permanents et les délégués principaux ont su convaincre les curateurs d’installer un centre de services temporaire sur le zoning, uniquement pour la CSC.
Pendant 9 jours, de 9 heures du matin jusqu’à parfois 19 heures, les ouvriers et les employés sont venus montrer leurs documents, poser leurs questions et dire ce qu’ils ont sur le cœur. Pour bon nombre d’entre eux, c’était peut-être la dernière fois qu’ils voient leurs collègues.
«Nous avons lancé cette initiative le 26 avril, et nous étions présents jusqu’au 8 mai», explique Peggy Schuermans, secrétaire syndicale, qui, elle aussi, fait la file à l’accueil pour veiller au bon déroulement des opérations. «Le premier conseil d’entreprise extraordinaire s’est réuni le 11 mars. Nous avons rapidement compris que la faillite était aussi un scénario envisageable. Vous connaissez le reste: si aucun investisseur ne se présentait pour le 31 mars, Van Hool devrait fermer. Très rapidement, nous avons contacté les collègues des services aux membres et ceux des provinces, pour déterminer la marche à suivre. En effet, pareil phénomène sort de l’ordinaire. Heureusement, la CSC n’avait plus vécu une faillite d’une telle ampleur depuis celle de la Sabena».
Nous n’avions plus vécu une faillite d’une telle ampleur depuis celle de la Sabena.
Honnêtement, indépendamment des circonstances, le centre de services temporaire est impressionnant. Tous ceux qui viennent rencontrer les prestataires de services peuvent compter que leur vie privée est respectée. Toutes les facilités informatiques nécessaires sont disponibles – les curateurs ont même fait installer une connexion de données supplémentaire. Surtout, il y a de la place pour des discussions entre (ex?-)collègues. Comme l’explique Peggy Schuermans, «Il est important que nous puissions organiser cette activité dans l’entreprise, dans un cadre familier. Il s’agit d’un des rares moments où nous pouvons rencontrer les affiliés. Nous devons prendre le temps pour cela. Finalement, tous les prestataires de services viennent ici volontairement. Ils et elles y consacrent de longues journées à traiter des dossiers complexes et à répondre à de nombreuses questions. Nous essayons de regrouper quelque peu les dossiers. Nous recevons d’abord les ouvriers, parce que le traitement de leurs dossiers à l’Onem demande un peu plus de temps. Ensuite, nous recevons les employés. Nous avons déconseillé aux gens de se présenter au centre de services; nous leur avons dit que nous les contacterions dès que nous aurions des nouvelles. Nous essayons d’informer tout le monde le mieux possible, même si, aujourd’hui encore, nos militants sont assaillis de questions».
Patrick Van Herck est un de ces militants. Il travaille chez Van Hool depuis quarante ans. Il est donc un des «anciens». Il est aussi un de ceux que le curateur de la faillite a engagés pour l’assister. «Les collègues se posent beaucoup de questions sur un redémarrage potentiel des activités. C’est logique. Certains ont déjà retrouvé un emploi. D’autres attendent de voir ce que le redémarrage des activités signifiera pour eux. Mais nous ne pouvons pas encore communiquer trop d’informations à ce sujet. VDL (la société néerlandaise qui souhaite racheter Van Hool, NDLR) a signé une déclaration d’intentions. Celle-ci doit encore se concrétiser par un rachat définitif», explique Patrick tandis qu’il regarde la salle remplie de collègues qui l’attendent.
«La moyenne d’âge des employés est de 49 ans, celle des ouvriers de 47 ans. Le personnel est donc assez âgé, ce qui ne facilite pas toujours la recherche d’un nouvel emploi. Certains collègues ont déjà vécu deux ou trois faillites, mais ce sont des cas exceptionnels. La plupart – comme moi – n’ont jamais connu d’autre employeur que Van Hool. Il y a vingt ou trente ans, Van Hool ne payait pas les plus gros salaires, mais la donne a changé au fil du temps. Certains collègues postulent ailleurs et je les entends dire qu’ils gagneraient environ 16 euros par heure… Ici, le personnel gagne quand même 18 à 20 euros par heure. Ils s’en étonnent et ils comprennent que nos conditions de travail ne sont quand même pas si mauvaises».
Un peu plus loin, les collègues de Doorstart+ organisent des sessions d’information sur le thème «Comment réagir en cas de licenciement?» Ce projet [mis sur pied par la CSC pour soutenir dans les moments difficiles de leur carrière, NDLR] existe depuis longtemps. En ce début d’année, il a été élargi aux restructurations et aux faillites. Certains se sont inscrits eux-mêmes, tandis que d’autres sont contactés dans la salle. Vendredi matin, une quinzaine de travailleurs participent à la session. Il n’y a pas de tour de table classique de présentation. Par contre, chacun recherche une photo qui décrive le mieux possible son état d’esprit. Les uns présentent une montagne, d’autres une lumière, d’autres encore, une tornade, etc. Et effectivement, cela décrit les sentiments que la plupart des gens partagent. Certains ont déjà retrouvé un emploi, d’autres pas encore. En parler reste difficile, surtout pour ceux qui travaillent chez Van Hool depuis plus de trente ans.
Karin Blommaert, accompagnatrice CSC dans le cadre des ateliers d’information et de recherche d’emploi: «Nous voyons bien que les gens ont besoin d’en parler. Mais participer aux sessions demande un gros effort à certains. Ce qui compte, c’est d’offrir de nouveau des perspectives d’avenir aux travailleurs, de leur montrer comment ils peuvent accomplir des démarches pour se réinsérer sur le marché de l’emploi».
De ce point de vue, la fédération sectorielle Agoria a rassemblé quelque 1.700 offres d’emploi pour aider les travailleurs licenciés à retrouver rapidement et efficacement un emploi dans d’autres entreprises de la région, spécialisées dans les secteurs de la technologie. Le 28 mai, elles ont également organisé aussi une bourse à l’emploi, en présence d’environ 400 entreprises.
© Maarten De Bouw