Le dossier

L'info n°226/01/2024

On doit toujours retrousser nos manches pour faire les réparations!

Alexis (35 ans) travaille depuis sept ans dans un garage à Arlon. Cet aide-soignant, devenu mécanicien automobile polyvalent après avoir suivi une formation sur le campus de Spa-Francorchamps, aborde les changements qui traversent son métier.

Propos recueillis par David Morelli

Quel est le moteur de l’évolution du métier de mécanicien?

L’arrivée des technologies dans les véhicules (ordinateurs de bord, GPS…) a constitué une première grosse transition. Aujourd’hui, on ne fait plus rien sans ordinateur, même pas changer une plaquette de frein. Les plus anciens ont parfois du mal avec cette transition, par désintérêt ou incompréhension par rapport à l’informatique. Mais il y a toujours une partie de mécanique. L’ordinateur n’est qu’un journal de bord qui nous permet de repérer la zone où il y a un souci. C’est à nous d’en trouver la cause et de retrousser nos manches pour réaliser la réparation.

L’électrification change-t-elle la donne?

L’arrivée des véhicules électriques constitue une autre phase et une évolution importante. Elle nécessite des formations spécifiques, du matériel supplémentaire et le respect rigoureux de nouvelles consignes de sécurité. Certains travailleurs ont peur, voire refusent de travailler sur ce type de véhicule, les jugeant dangereux. Et ils le sont: on travaille avec de la haute tension. La moindre mauvaise manipulation ou seconde d’inattention peut se transformer en drame. Les interventions sur un véhicule électrique sont également plus contraignantes, tant pour le travailleur, qui doit porter un équipement de protection individuelle particulier supplémentaire, que pour l’employeur. Chaque garage doit, par exemple, avoir une zone de quarantaine. Tous les garages n’ont pas la place ou les moyens. Cela participe au processus de concentration du secteur…

L’arrivée des véhicules électriques est une évolution importante de notre métier.

Comment rester à niveau face à une évolution technologique très rapide?

L’importateur a des exigences en matière de techniciens formés pour la prise en charge de ces véhicules. Il y des formations spécifiques pour pouvoir prendre en charge ce type de véhicule. Cela va de la sensibilisation à l’électrisation (HEV0) jusqu’à l’autonomie de travail sur la haute tension (HEV3). Mais ces compétences ne sont pas couplées à des augmentations salariales. Je trouverais normal que le salaire évolue en ce sens.

On assiste à une concentration dans le secteur des garages: c’est une réalité là où vous travaillez? 

Il y a énormément de rachats par des grands groupes. Le garage où je travaille est désormais rattaché à un groupe qui recouvre une trentaine de garages. C’est un cas concret de centralisation: il y a de moins en moins de petits garages, entre autres, parce qu’il faut de plus en plus de matériel qui doit être de plus en plus spécifique, parce que les compétences des mécaniciens doivent être constamment mises à jours, etc. Ce sont des frais que les garages ne peuvent affronter seuls et, du coup, ils doivent se attacher à des groupes importants pour rester compétitifs et avoir du personnel qualifié. Même les constructeurs automobiles se regroupent entre eux pour rester concurrentiels. Les garages suivent le mouvement et font partie de groupes qui regroupent désormais parfois jusque cent garages. Personnellement, le fait d’être repris par un grand groupe n’a pas eu de conséquences négatives au niveau du travail. Cela a même été positif en termes d’achat de matériel.

Comment appréhendez-vous l’avenir du secteur?

Alors que l’on a déjà du mal à trouver des jeunes pour réparer des véhicules standard, le travail de mécanicien demande de plus en plus de connaissances, en matière d’informatique, d’électricité… Le secteur n’attire pas les jeunes. C’est peut-être lié aux salaires ou aux conditions de travail qui sont sans doute plus dures que dans un bureau.

© David Morelli