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L'info n°1026/05/23

Aujourd’hui Delhaize.
Et demain?


Le front commun
syndical a défendu le droit de grève.

Quelque 25.000 personnes ont manifesté le 22 mai dernier dans les rues de Bruxelles pour exprimer leur refus de voir le changement de modèle économique opéré par Delhaize faire tache d’huile, et pour défendre le droit de grève.

David Morelli

«Aujourd’hui Delhaize, demain à qui le tour?». Derrière ce slogan transparaît l’angoisse de nombreux travailleurs et travailleuses qui ont perçu ce qui se jouait dans le dossier Delhaize: un dumping social qui ne dit pas son nom, et une sévère remise en cause du droit de grève. 25.000 personnes issues de l’ensemble des secteurs ont répondu à l’appel lancé par la CSC, la FGTB et la CGSLB. Ils ont marqué leur soutien au combat pacifique et digne des Delhaiziens, face au risque de normalisation du dumping social que laissent augurer les pratiques de la direction de Delhaize. «L’élite a décidé que nous devions tous travailler plus longtemps, plus dur et moins cher, a dénoncé Marc Leemans, président de la CSC, devant une foule tricolore. Avec cette manifestation, nous montrons que nous ne nous laisserons pas intimider. Les gens ont des droits humains. Nous exigeons le respect de chaque travailleur: un salaire décent, un travail convenable, et le droit de manifester! Chez Delhaize, chez TotalEnergies, chez tous les employeurs».

Opposition à la franchisation

«Il y a un acte de solidarité que l’on doit poser vis-à-vis des travailleurs et travailleuses de Delhaize, explique Jordan Atanasov, secrétaire principal Metea. Le système économique détruit ce qui est lié à la cohésion sociale et aux conditions de travail futures de ces travailleurs. Il faut s’y opposer. On doit être vigilant à ce que ce modèle économique ne se reproduise pas dans notre secteur.»

Même son de cloche chez Albert Donkerwolke, délégué principal Colruyt Bruxelles: «Ce qui se passe chez mes collègues de Delhaize est inacceptable. On doit être là pour les soutenir. C’est important pour nous d’être là, car si la franchisation de Delhaize se réalise, cela risque d’avoir un impact dans d’autres grandes enseignes de l’alimentation.»

«Justice nulle part»

La manifestation a fait un détour par le Palais de Justice, où un immense calicot «Profits partout, Justice nulle part», placé sur la façade, appelait les manifestants et la population à boycotter l’enseigne au Lion. En effet, nombre de travailleurs présents étaient également là pour affirmer leur droit de manifester et de faire grève (lire édito en p.12). Ce droit a été gravement remis en cause par les dérapages (arrestation d’une déléguée avec menottes, fouille des syndicalistes, interventions d’huissiers et des forces de l’ordre…) et les décisions de justice, qui font passer le droit commercial avant le droit d’action collective. Un dangereux précédent pour les mouvements sociaux. «En passant par la justice, les patrons nous privent du droit de défendre les intérêts des travailleurs, constate Stéphane Daussaint, responsable national Poste et Télécom à la CSC Transcom. Le patronat perpétue son combat: détériorer les conditions des travailleurs au profit des actionnaires. Les huissiers sont de plus en plus présents pour empêcher les délégués syndicaux et les affiliés de manifester leur mécontentement.» Pourtant, comme l’affirme Valérie Verdoodt, déléguée CSC bâtiment – industrie & énergie (CSCBIE) dans l’entreprise de travail adapté Manufast, «il est important de conserver le droit de grève pour pouvoir régler les nombreux problèmes que nous rencontrons dans notre secteur.»


Sur le Palais de Justice, une bannière dénonçait les atteintes au droit de grève.

La lutte continue

Cette manifestation de soutien a été apprécié par Patricia, une des nombreuses Delhaiziennes présentes: «Cela fait chaud au cœur de voir que d’autres secteurs participent à cette manifestation. C’est un enjeu pour l’avenir de tout le monde. Cette manifestation nous donne la force de continuer le combat.» Une affirmation qui corrobore l’analyse de Myriam Djegham, permanente nationale secteur commerce à la Centrale nationale des employés (CNE). «Les travailleurs sont déterminés dans leur lutte. Ça les nourrit de sentir que tous les travailleurs des autres secteurs sont solidaires avec leur lutte et se rendent compte que ce qui est en train de se passer chez Delhaize pourrait potentiellement arriver dans d’autres entreprises.» Et la permanente de conclure par «la lutte continue!» qui ne laisse aucun doute sur la détermination des Delhaiziens.

Découvrez la vidéo réalisée lors de la manifestation pour (re)vivre l’ambiance et la solidarité lors de cette journée de mobilisation nationale.

© La CSC, © Donatienne Coppieters, © Roger Job