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L'info n°1223/06/23

Nettoyage

Les professionnels du nettoyage réclament une revalorisation de leur métier difficile


Quand les négociations ont été dans l’impasse, les travailleurs ont directement

Le 20 juin dernier, la CSC Alimentation et Services (CSC A&S) a organisé sa traditionnelle «Journée des Pros du Nettoyage». Nettoyer est un métier difficile et éprouvant, qui requiert des compétences variées, mais qui est très mal payé. La CSC A&S a lancé une pétition pour réclamer de meilleurs salaires pour le personnel de nettoyage et organisé des actions de sensibilisation à leurs conditions de travail.

David Morelli

En Belgique, plus de 200.000 personnes, principalement des femmes, gagnent leur vie en nettoyant: aide-ménagères en titres-services, femmes de chambre, laveurs de vitres, concierges, personnel de nettoyage dans les écoles ou les entreprises, etc. Tous ces métiers essentiels, dont l’utilité a encore été soulignée lors de la pandémie de Covid-19, ne sont malheureusement toujours pas considérés à leur juste valeur.

Travail pénible, salaires de misère

Tôt le matin ou tard le soir, seul à domicile ou dans des conditions de travail insalubres et dangereuses, le nettoyage est un travail difficile qui est largement sous-estimé. «J’ai 35 ans, et j’ai mal partout. Bientôt, je vais devoir avoir quelqu’un pour m’aider à sortir de mon lit. Ce n’est pas normal. Je ne veux pas finir en chaise roulante», témoigne une aide-ménagère en titres-services. L'année dernière, l'inspection du bien-être a effectué des contrôles dans 175 entreprises de titres-services. 9 entreprises sur 10 ne respectent tout simplement pas les règles sanitaires, avec toutes les conséquences négatives sur le bien-être des travailleurs.

À la pénibilité du travail s’ajoutent des salaires très bas. Les aide-ménagères et le personnel de nettoyage figurent en effet parmi les trois professions les moins bien rémunérées. Le salaire médian d'un nettoyeur à temps plein en 2023 est de 2.289 euros brut par mois. La plupart des professionnels du nettoyage travaillant à temps partiel (le temps plein étant souvent impossible physiquement), cela signifie qu’ils se retrouvent juste au-dessus, voire en-dessous, du seuil de pauvreté. En outre, la loi sur la norme salariale, telle qu’est appliquée aujourd’hui, les condamne à jamais à des salaires de misère.

Une revalorisation des salaires permettrait une meilleure considération et attractivité de ce travail, où des milliers d'emplois restent vacants.

Surreprésentations

Les bas salaires et la charge de travail élevée sont symptomatiques du manque de reconnaissance et d'appréciation sociale de ce travail. «Le nettoyage reste trop souvent considéré comme une tâche que les femmes accomplissent gratuitement depuis des siècles. Sur le plan professionnel aussi, ce travail est considéré comme “inférieur”. Ce n’est pas un hasard si la grande majorité des personnes actives dans les métiers du nettoyage sont des femmes. Et quand il s’agit d’hommes, ils sont le plus souvent d'origine étrangère», constate Pia Stalpaert, présidente de la CSC A&S.

«Une revalorisation des salaires constituerait un pas important vers une meilleure considération et une plus grande attractivité de ce travail, alors que des milliers d'emplois restent vacants dans les secteurs du nettoyage», poursuit Pia Stalpaert. La CSC A&S a donc décidé de lancer une pétition1  pour réclamer de la part du monde politique et des employeurs des augmentations de salaire significatives, soit, concrètement, au moins 1 euro de l’heure.

Remercier et agir

Le 20 juin, des actions ont donc été organisées dans toute la Belgique à l’occasion de la Journée des Pros du Nettoyage.

Les travailleurs et travailleuses évoluant dans les métiers du nettoyage ont été à la rencontre des passants dans plusieurs villes de Wallonie et à Bruxelles. Objectif: les informer sur leurs conditions de travail, et les convaincre de signer la pétition pour une meilleure valorisation salariale de leur métier.

À Bruxelles, à l’aide d’une «Roue de l’infortune», une septantaine de militants ont sensibilisé les passants aux conditions de travail difficiles (manque de respect, invisibilisation, faibles salaires…) et aux réalités du secteur (incapacités de longues durées, horaires de travail difficilement conciliables avec une vie de famille…). Place de la Monnaie, un flashmob au son de «Maldon» (Zouk Machine) a permis de mettre en lumière de manière ludique le secteur, dans une chorégraphie où les strass et les paillettes ont fait place aux balais et aux torchons.

À Charleroi, des animations ont été mises en place sur la Place verte pour permettre à la quarantaine de délégués présents d’entamer des échanges avec les passants. Une «Roue de l’infortune» a permis de pointer les différences abyssales entre les bénéfices du secteur et les salaires de ces travailleuses et travailleurs, aux revenus proches du seuil de pauvreté.

À Liège, c’est un séminaire sur les maladies professionnelles, axé sur les secteurs du nettoyage, qui a été organisé. L’occasion de faire un état des lieux des débats sur la reconnaissance des maladies professionnelles et sur l’élargissement potentiel de sa liste à d’autres maladies. Les démarches à réaliser pour entrer un dossier ont également été abordées. 

À Namur, les groupes de passage à la CSC de Bouge ont été invités à manifester leur soutien par un mot de remerciement ou une petite attention aux professionnels du nettoyage qu’ils croiseront.

Enfin, les représentants des ouvriers et des enseignants de l’école ELMA (Enseignement Libre à Marche) ont été remercier les ouvriers qui y travaillent, souvent de manière invisible, et leur ont distribué des goodies (post-it, gilet fluo de sécurité, gel hydroalcoolique, etc.).

Photos © CSC A&S