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L'info n°423/02/2024

Six revendications pour un meilleur équilibre

1. Des papas plus présents


Un congé de naissance obligatoire et allongé pour les papas et
co-parents. 

Selon une étude réalisée par l’ULB-Dulbea en 2021, la carrière des femmes paie un lourd tribut à la maternité. Elle représente une diminution de 43% pour le revenu des femmes et un doublement du taux de maladie jusqu’à huit ans après la naissance de l’enfant. Aucun impact similaire n’est observé chez les pères.

La bonne nouvelle est que l’allongement du congé de naissance (pour le père ou le co-parent) et son caractère obligatoire constituent un levier efficace pour favoriser une répartition équitable des tâches domestiques et des soins aux enfants. Actuellement, ce congé, non obligatoire, s’élève à 20 jours. Selon l’étude, l’octroi de deux semaines de congé de naissance réduit déjà significativement l’impact négatif sur la carrière professionnelle et la santé des femmes: c’est donc un levier d’action efficace à activer pour lutter contre l’écart salarial femmes-hommes.

Le congé de naissance permet, dès l’arrivée de l’enfant, de mieux répartir les tâches domestiques et familiales, de limiter la perte de revenu des femmes, de reprendre mieux et plus rapidement leur place dans le monde du travail, et de diminuer l’impact sur leur santé. Qu’attend-on pour allonger encore le congé de naissance et le rendre obligatoire?

2. Une place en crèche pour chaque enfant


Des lieux d’accueil accessibles et de qualité.  

L’accueil des enfants est un réel problème en Belgique. Chaque jour, le manque d’accès aux services d’accueil contraint des parents à sacrifier le salaire le plus bas du couple (généralement celui de la femme). La décision du gouvernement de ne plus permettre, depuis février 2023, l’accès au crédit-temps pour motif de «soins aux enfants» aux travailleurs à temps partiel risque fort d’empirer cette situation.

Pour les parents qui travaillent, et surtout pour les femmes, qui portent encore très majoritairement la charge parentale, il est urgent de trouver une solution durable à l’aggravation des problèmes d’offre, de qualité et d’accessibilité des crèches. En effet, parallèlement au problème d’offre, la question du coût de l’accueil reste cruciale. Cela peut aboutir à un appauvrissement des parents ou à une diminution de leur temps de travail ou de celui des grands-parents, qui suppléent le manque de crèches.
Une offre suffisante de places d’accueil de qualité, financièrement accessibles et flexibles aurait un impact important sur l’emploi des mères, rappelle une étude récente. En effet, la moitié des mères qui n’ont actuellement pas recours à des structures d’accueil travailleraient davantage ou reprendraient le travail si une offre plus étendue était disponible.

3. 25 jours de congés payés


Plus de temps, sans conditions et sans perte de salaire. 

Dans les PME, asbl et petites structures, les travailleurs doivent souvent se contenter des 20 jours de congés légaux, sans pouvoir les placer librement. Vu l’intensification du rythme de travail, c’est insuffisant pour pouvoir souffler! Pour la CSC, il est important et urgent que chaque travailleur puisse avoir droit à une semaine de congés payés supplémentaires.

4. Une vraie répartition des tâches domestiques et familiales


Une réelle politique de sensibilisation aux stéréotypes et de répartition des tâches au sein des couples.
 

Les femmes consacrent plus de temps que les hommes aux tâches domestiques. Les différences les plus significatives apparaissent lorsqu’il y a des enfants: les femmes avec de (jeunes) enfants y consacrent presque deux fois plus de temps que les hommes.

5. Du temps pour concilier et pour souffler


Les crédit-temps, congés thématiques et interruptions de carrière doivent être renforcés, accessibles sans perte financière, avec une assimilation des droits sociaux.

Des systèmes comme le congé parental et le crédit-temps pour motif de «soins à un enfant de moins de 5 ans» permettent à la personne qui passe à temps partiel de conserver un revenu pour ce temps partiel et de bénéficier d’une «assimilation à temps plein» pour la pension. Ce dernier point est malheureusement remis en question par le gouvernement, qui a par ailleurs supprimé la possibilité pour les travailleurs à temps partiel d’accéder au crédit-temps «soins».

Ce sont surtout les femmes qui en pâtissent: en mai 2023, 61,3% des travailleurs optant pour un crédit-temps, un congé thématique ou une interruption de carrière étaient des femmes. Il s’agit de remédier à cette inégalité.

Enfin, dans un pays où seuls les parents salariés dans un emploi stable ont droit à un congé parental, on constate également une inégalité dans la prise des congés. De nombreuses mères ne peuvent pas en bénéficier en raison de critères d’éligibilité restrictifs, en particulier les femmes jeunes, célibataires, en contrat précaire.

6. Lutter contre les temps partiels non choisis


Tout le monde doit avoir un salaire complet et des droits sociaux pleins, pour bénéficier d’une réelle autonomie économique et financière et pouvoir concrétiser ses propres choix. 

Une femme sur deux travaille à temps partiel. Une question essentielle se pose: une femme opte-t-elle pour le temps partiel parce qu’elle souhaite avoir du temps pour elle, ou parce que le manque de place dans les crèches, une charge de travail domestique trop importante, un travail pénible… le lui impose? Dans la très grande majorité des cas, ce n’est pas un réel choix, et certains secteurs ne proposent d’ailleurs que ce type de contrat. Or, le travail à temps partiel a des répercussions directes sur le salaire et sur les droits à la sécurité sociale tout au long de la carrière et au moment de la pension. En cas de perte d’emploi, de maladie ou en fin de carrière, les allocations et la pension sont calculées sur la base du salaire brut.

Revendication transversale: des services publics renforcés, accessibles et de qualité

Les services publics et collectifs peuvent faire gagner un temps précieux aux femmes tout au long de leur journée, et leur permettre de faire glisser leur temps de travail non rémunéré au travail rémunéré.
Quelques exemples: les crèches à projet social, l’amélioration des transports publics, les repas chauds de qualité et abordables à l’école, ou encore l’organisation du déplacement collectif des enfants après l’école vers l’académie ou les clubs de sports. Ces bonnes pratiques, trop rares, devraient devenir la norme. Elles sont souvent une question de pression, de volonté politique et d’organisation. Tout le monde y gagne, et les femmes en premier!

Accueil: un exemple à suivre

La Maison des enfants, à Nivelles, est un exemple à suivre. Des places y sont réservées aux chômeurs en réinsertion socioprofessionnelle afin que les enfants s’acclimatent et que les parents prennent confiance en l’institution. Lorsqu’ils et elles vont en formation ou reprennent le travail, l’enfant bénéficie alors d’une place d’accueil à temps plein.


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