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L'info n°1106/06/2025

Réforme des allocations de chômage: une inquiétude croissante à Bruxelles

La limitation dans le temps des allocations de chômage, prévue pour janvier 2026, suscite une vague d’inquiétude à Bruxelles. Lors d’une session d’information organisée par la CSC Bruxelles en mai 2025, plus de 400 participants ont exprimé leurs craintes face à une réforme déconnectée des réalités sociales.

Tom Meremans

L’objectif – affiché – du gouvernement est de responsabiliser les demandeurs d’emploi. Mais les témoignages recueillis lors de cette session d’information brossent un tableau bien différent, en plus d’être alarmant: incompréhension des règles, peur de la pauvreté et sentiment d’abandon. La limitation des allocations risque de plonger de nombreux Bruxellois dans la précarité et l’exclusion sociale.

Des obstacles ignorés par la réforme

La réforme passe sous silence plusieurs réalités du marché de l’emploi bruxellois. D’abord, les barrières linguistiques: dans la capitale, la maîtrise du néerlandais est souvent exigée. Les formations linguistiques, pourtant cruciales, ne sont pas reconnues comme une exception à la limitation, pénalisant les primo-arrivants et les personnes en reconversion. Ensuite, le travail précaire non valorisé: les emplois en Agence locale pour l’emploi (ALE), qui maintiennent les personnes actives, ne sont pas considérés comme suffisants pour conserver les droits. Enfin, les vulnérabilités individuelles sont également ignorées: âge, santé ou situation sociale ne sont pas pris en compte, imposant une approche uniformisée qui nie les parcours individuels.

Des voix qui interpellent

Lors de la session d’information, plusieurs participants ont partagé leurs angoisses face à la réforme.
 
Marie, 52 ans, est atteinte de problèmes de santé chroniques: «Mes douleurs chroniques m’empêchent de travailler à temps plein depuis de nombreuses années. On me dit que reprendre un emploi à temps plein, ça sera bon pour mon mental et que si je n’y arrive pas, je n’ai qu’à remettre des certificats. Mais je ne peux pas travailler à temps plein, ça m’est impossible physiquement. Et sans allocations, comment vais-je payer mes soins? Cette réforme me condamne en quelque sorte à la misère.»

Amina, 34 ans, est universitaire polyglotte: «Je parle six langues, j’ai un diplôme universitaire, mais les emplois que je trouve ne correspondent pas à mes compétences. On me dit de persévérer, mais sans allocations, je ne tiendrai pas longtemps.»

João, 41 ans, est en recherche d’emploi: «À Bruxelles, sans néerlandais, c’est presque impossible de décrocher un poste stable. Je veux apprendre, mais les formations prennent du temps, et la réforme ne me laisse aucune marge.»

À Bruxelles, sans néerlandais, c’est presque impossible de décrocher un poste stable. Je veux apprendre, mais les formations prennent du temps, et la réforme ne me laisse aucune marge.»

Déséquilibre et complexité

La réforme suppose que l’emploi est à la portée de tous. Or, le marché de l’emploi fait preuve d’un véritable déséquilibre structurel: 180.000 emplois sont vacants, pour 300.000 demandeurs d’emploi. Le marché est saturé, et aucun effort significatif n’a été fait pour créer des emplois. La complexité administrative va compliquer la vie des demandeurs d’emploi. En supprimant les allocations sans alternatives, la réforme pousse les plus précaires vers l’économie informelle, voire la criminalité de survie. Cette violence institutionnelle fragilise les populations les plus vulnérables. Pour éviter une catastrophe, il est urgent de repenser cette réforme en tenant compte des besoins réels des citoyens.