L’arrêté royal sur les informations économiques et financières à fournir aux représentants du personnel au sein des conseils d’entreprise a 50 ans! Une évolution s’impose…
Isabelle Debroux
C’est dans un contexte de démocratisation de l’économie que l’arrêté royal de 1973 a vu le jour. En permettant aux travailleurs et travailleuses de comprendre l’information économique et financière (IEF) de leur entreprise, le législateur a voulu créer les conditions d’une réelle vie démocratique au sein des entreprises. En tout cas, tel était l’esprit du texte de loi de 1973, et tel est toujours l’esprit de la concertation sociale en la matière.
Faciliter l’accès à une information claire, compréhensible et pertinente, c’est donner l’occasion aux travailleurs d’échanger avec la direction sur des éléments stratégiques tout en apportant les perspectives de leur réalité de terrain. C’est aussi leur accorder l’opportunité de mener un travail d’anticipation sur leurs préoccupations premières: l’activité, l’emploi, la qualité de l’emploi, l’organisation du travail, l’adaptation des compétences, la rémunération, etc.
Syndicats, directions et réviseurs ont hérité de cette organisation de la démocratie au travail, et la font vivre dans quelque 3.200 conseils d’entreprise.
Cet arrêté royal donne tout son sens au dialogue social en entreprise. Ce n’est pas un hasard s’il a été fêté en grande pompe le 30 janvier dernier par le Conseil central de l’économie, l’organe consultatif paritaire entre travailleurs et employeurs. Lors de cette cérémonie, Sophie Reginster, économiste à la CSC Liège-Verviers-Ostbelgien (LVO), et Bart Vannetelbosch, secrétaire national de la CSC, ont été invités à prendre la parole. L’un et l’autre ont insisté sur la nécessité d’actualiser cet arrêté royal, car en un demi-siècle, le paysage économique a considérablement changé. La part des services a augmenté, le non-marchand s’est développé, le nombre de femmes au travail a progressé, la responsabilité environnementale et sociétale des entreprises est de plus en plus engagée… Quant à l’économie, elle s’est mondialisée et financiarisée. L’information économique et financière doit s’adapter à ces évolutions ainsi qu’à la nécessité de contribuer à l’amélioration du dialogue social.
«Bien sûr, de bonnes pratiques se mettent en place pour faire vivre le dialogue social. Mais, au-delà des initiatives propres à certaines entreprises, le contenu de l’information économique et financière doit évoluer pour rencontrer les nouveaux défis du monde du travail tels que la décarbonation, la digitalisation, la sous-traitance, l’intégration de sociétés locales dans des multinationales, etc. Il s’agit d’aider les travailleurs à y voir clair, tout en s’adaptant aux réalités et aux enjeux d’aujourd’hui et de demain», insiste Sophie Reginster.
La bonne gouvernance des entreprises doit passer par une plus grande transparence encore, et celle-ci doit être organisée plus formellement, de manière à mieux intégrer la concertation sociale dans le monde de l’entreprise.
Enfin, comme l’a souligné Bart Vannetelbosch, l’accès à l’information économique et financière doit être étendu aux entreprises à partir de cinquante travailleurs. Une obligation européenne qui n’est pas toujours pas mise en place en Belgique!
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L’information économique et financière doit s’adapter aux évolutions du monde actuel.