Le dossier

L'info n°1220/06/2025

Acquérir des compétences

en développant ses aptitudes

avec le centre aptaskil

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Depuis vingt ans, aptaskil, le centre de compétence wallon pour les métiers de la chimie, du (bio)pharma et des biotechnologies, forme et met à jour les compétences des travailleurs de ces secteurs. Les syndicats, dont la CSC, participent activement à sa réussite.

David Morelli


«Ce centre de formation dispose d’un matériel incroyable en termes d’outillage pour la chimie, la pétrochimie et les sciences de la vie. C’est phénoménal!»
, s’enthousiasme Rico Zara, secrétaire régional à la CSC
bâtiment – industrie & énergie (CSCBIE) pour la région de Mons-La Louvière-Hainaut Occidental. Lorsqu’on lui demande de présenter le centre de compétence aptaskil (Seneffe), dont il est par ailleurs le vice-président de l’organe d’administration, il se montre en effet particulièrement enthousiaste. «Le centre est connu et reconnu. Nos collègues flamands le jalousent même un peu», ajoute-t-il avec un sourire. 

191.000 heures

Il est vrai que la trajectoire de ce centre, qui a fêté ses vingt ans en 2023, est enthousiasmante. «Les promoteurs du projet avaient estimé qu’en vitesse de croisière, le centre dispenserait 40.000 heures de formation par an. Aujourd’hui, nous en sommes à 191.000 heures», se réjouit Isabelle Legentil, sa directrice. Créé à l’initiative de la fédération sectorielle et des syndicats en 2003, CefoChim, dénomination du centre jusqu’en 2021, visait à répondre au besoin de former des travailleurs aux métiers de production des entreprises chimique. En 2006, le Forem rejoint Essenscia et les trois syndicats dans le conseil d’administration. En 2010, des compétences pour les métiers de la production biopharma sont intégrées au centre. «Cette croissance est un miroir de la croissance de l’activité biopharma en région wallonne. De là, le changement de nom. aptaskil, notre centre, c’est l’endroit où des apprenants sur base de leur aptitude peuvent acquérir des compétences (skills, en anglais)», explique la directrice. Une croissance qui a abouti à l’agrandissement du site de Seneffe et à l’ouverture en septembre 2024, d’une antenne liégeoise dédiée spécifiquement à la production biopharmaceutique.

Le centre est connu et reconnu. Nos collègues flamands le jalousent même un peu»

Formation à tout âge

La mission principale du centre, labellisé centre de compétence wallon, est de former les travailleurs en activité, les futurs travailleurs (demandeurs d’emploi, étudiants…) et les enseignants aux métiers de la production et aux métiers connexes de supports de première ligne. Il forme donc des techniciens et des opérateurs de production, des techniciens de contrôle de qualité et de maintenance, mais aussi des chefs d’équipe et des responsables de département. «Des travailleurs de tout âge viennent se former, car ce sont des métiers où il faut faire des mises à jour tout au long de la vie», constate la directrice. Ce que confirme Rico Zara. «Un travailleur qui maintient son niveau de compétences reste employable. Si nous pouvons permettre aux travailleurs d’avoir des cordes à leur arc pour pérenniser leur emploi ou rebondir rapidement s’ils le perdent, nous aurons, en tant que syndicat, réussi quelque chose», explique-t-il.

Reconversions

Le centre aptaskil présente deux grandes modalités d’offres: des formations inter-entreprises, qui sont des formations sur catalogue financées par le Fonds de formation du secteur, et des formations intra-entreprise, qui sont des formations sur mesure, adaptées aux besoins d’une entreprise. Le centre constitue également un tremplin salutaire pour les travailleurs qui se trouvent dans une procédure Renault. «On essaie d’offrir des formations à des gens qui sortent de restructurations. Par exemple, une session Caterpillar, liée aux profils spécifiques de ses travailleurs, a été mise en place. Certains travailleurs, qui n’avaient en poche qu’un diplôme secondaire supérieur, ont pu, au bout de trois à quatre mois, devenir opérateurs de production. 85% des travailleurs qui en sont sortis ont trouvé un job», se réjouit Rico Zara.

Certains travailleurs, qui n’avaient en poche qu’un diplôme secondaire supérieur, ont pu, au bout de trois à quatre mois, devenir opérateurs de production."

Partenariats innovants


«Nous construisons des partenariats innovants avec des centres de formation professionnelle, l’enseignement – scolaire et de promotion sociale –ou encore des centres de technologie avancée afin de mutualiser les capacités et les expertises de chacun»
, explique Isabelle Legentil.

«Nous tentons par exemple de mettre en place des formations en alternance, en collaboration avec l’Ifapme, ajoute Rico Zara, qui se félicite par ailleurs du véritable dialogue social qui règne au sein du CA du centre. On n’est pas dans du rapport de force. On essaie vraiment de trouver par le dialogue le dénominateur commun qui va faire que l’on va pouvoir avancer ensemble.»

Après une décennie de croissance continue de l’emploi, les entreprises pharmaceutiques sont actuellement mises sous pression par les bouleversements géopolitiques actuels et leurs conséquences commerciales, comme l’augmentation des taxes d’exportation vers les USA. Cependant, aptaskil continue de proposer aux apprenants un outil performant construit sur la base solide de la concertation sociale.

Nous construisons des partenariats innovants avec des centres de formation… afin de mutualiser les capacités et les expertises de chacun»

S’adapter à l’avenir

Situé à Seneffe, deuxième pôle pétrochimique de Belgique aux portes du Brabant où se trouvent de nombreuses entreprises de bio-pharma, aptaskil s’étend sur quelque 4.000 mètres carrés. Il possède des locaux spécifiques qu’on retrouve en entreprise: des zones Atex (zones atmosphères explosives), des mini-usines avec des réacteurs, ou encore des complexes de salles blanches, comme dans les entreprises de production de médicaments. «Il est important qu’un centre comme celui-ci puisse avoir ce genre de locaux qui exigent des savoir-faire comportementaux très spécifiques. On est vraiment sur du transfert de vécu, sur ce qu’il faut faire et ne pas faire. C’est pourquoi les formateurs sont des personnes qui ont une longue expérience et de grandes compétences», explique la directrice, Isabelle Legentil. Axé sur la pédagogie, le centre possède également des laboratoires tout en transparence afin que les apprenants puissent visualiser ce qui s’y passe. En matière d’équipement, tout l›outillage qu’un opérateur de production en chimie ou en bio-pharma pourrait retrouver en industrie est présent. Parfois même à échelle réduite, sur mesure pour la formation. «Les apprenants travaillent vraiment comme dans les conditions et avec le matériel d’une entreprise», certifie M. Zara.

Nouvelles réalités

Entre 3.000 et 4.000 personnes y sont formées tous les ans. Avec son nouveau site liégeois, aptaskil s’attend à rapidement en former entre 5.000 et 6.000. «Nous devons rester à l’écoute des évolutions pour pouvoir adapter les cursus existants ou en créer des nouveaux», analyse la directrice, dont le centre prépare l’avenir en se lançant dans la digitalisation des contenus. «On arrive dans un tournant au niveau de l’intelligence artificielle. On vient de développer un module de formation pour initier les travailleurs à l’emploi de lunettes en réalité virtuelle pour manipuler des produits dans des laboratoires, témoigne Rico Zara. Le niveau de compétence augmente dans les entreprises. Nous allons faire en sorte que le niveau de compétence du centre augmente lui aussi.»

D.Mo.

Isabelle Legentil, directrice d’aptaskil.