Une convention collective de travail (CCT) imposée par l’entreprise de titres-services XLG Home liait le montant des chèques-repas de chaque aide-ménagère à son nombre de jours d’absence pour cause de maladie. Témoignage d’un combat syndical face à une convention discriminatoire.
Propos recueillis par David Morelli
«Dans le secteur des titres-services, chaque jour, une aide-ménagère sur cinq est en incapacité de travail. Une sur dix est en maladie de longue durée. Chez XLG Home, qui emploie 4.000 personnes en Wallonie et à Bruxelles, le constat est identique. Les causes principales? Troubles musculosquelettiques, tendinopathies, problèmes cutanés..., explique Sylviane Arnould, permanente CSC Alimentation & Services en charge des titres-services. Nous constatons également un lien direct entre l’ancienneté et les troubles de la santé. L’employeur a bien conscience de ce problème. Cependant, pour réduire le coût des incapacités de travail pour son entreprise, il a choisi le système de la carotte et du bâton: pour récompenser celles qu’il appelle “les bonnes aides-ménagères”, c’est-à-dire celles qui ne sont pas malades, il octroyait un chèque-repas plus élevé (5 euros au lieu de 4,70 euros déjà existant). Celles qui ont ce qu’il appelle un “taux de fiabilité” plus bas étaient pénalisées et recevaient un chèque-repas moins élevé, voire aucun durant le trimestre suivant! L’employeur espérait ainsi inciter les aides-ménagères à être moins malades, mais aussi à venir travailler tout en étant malades. Honteux! À aucun moment, il n’était question de prévention…»
La délégation syndicale de XLG Home.
Comment réagir face à une pratique aussi discriminante? «Le défi pour les déléguées était de créer de la solidarité dans un secteur où il est très compliqué de communiquer avec les collègues et où organiser une assemblée est presque infaisable, rappelle la permanente. Il fallait pouvoir expliquer aux travailleuses que nous ne sommes pas tous égaux à différentes périodes de la vie en matière de santé. C’était un débat vraiment difficile dans un secteur où les travailleurs et travailleuses vivent souvent une grande fragilité économique et sociale: fallait-il refuser la convention et prendre le risque de perdre les chèques-repas, ou accepter une proposition inacceptable et discriminatoire? Le maintien de cette signature, c’était aussi la porte ouverte pour que d’autres entreprises s’inspirent de cet exemple.» Les délégations syndicales ont activé tous les leviers possibles: médiatique, politique et juridique afin de mettre en lumière leur situation. En juin 2024, après presque trois mois de combat, l’employeur a capitulé et une nouvelle convention a été signée.
«Nous sommes fières d’être parvenues à faire annuler cette CCT, mais la direction n’a toujours pas compris l’enjeu de la prévention pour diminuer le nombre d’incapacités de travail. Le dialogue social reste vraiment difficile», conclut Sylviane Arnould.
© CSC A&S