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L'info n°2105/12/2025

Pension: les grandes lignes de la réforme

La réforme des pensions va aboutir à des changements importants en matière de conditions d’accès à la pension anticipée et de calcul du montant des pensions. Quel sera l’impact sur les ouvriers du secteur privé?

David Morelli

Le gouvernement fédéral est parvenu, dans la foulée de son budget, à trouver un accord sur la réforme des pensions. Ces mesures devant encore contrôlées par le Conseil d’état et votées par le Parlement, elles ne sont pas encore en vigueur. Rien ne change donc pour les personnes qui prendront leur pension anticipée en 2025. Néanmoins, elles introduisent des changements majeurs dans un avenir très proche et confirment un statu quo: celui de l’âge légal de la pension (66 ans aujourd’hui, 67 ans à partir de 2030). La réforme n’introduit malheureusement aucun changement en la matière concernant les métiers pénibles (sur ce sujet, lire L’Info n°18 sur les résultats de l’enquête menée auprès des travailleuses du secteur des titres-services).

Pension anticipée

La pension anticipée (à ne pas confondre avec le RCC/prépension), c’est la situation où une personne prend sa pension avant l’âge légal de la pension (66 ans). La réforme confirme le durcissement des conditions de carrière annoncé par le gouvernement dans son accord d’été. De manière très succincte, la pension anticipée ne sera désormais accessible que si toutes les conditions d’âge et de carrière sont remplies: 61 ou 62 ans avec 43 ans de carrière ou 63, 64 ou 65 ans avec 42 ans de carrière. Pour obtenir une année complète de carrière, le seuil sera relevé de 104 à 156 jours. Dans ce contexte, pour les personnes qui prendront leur pension avant le 1er janvier 2027, toutes les années de travail d’au moins 104 jours seront prises en compte. À partir du 1er janvier 2027, seules les années de travail d’au moins 156 jours seront prises en compte.

Des ajustements ont été faits car nous avons dénoncé des anomalies.

L’impact négatif du malus

En cas de départ à la pension avant l’âge légal, la réforme confirme qu’un système de bonus/malus s’applique pour chaque année anticipée et que, a contrario, en cas de départ à la pension après l’âge légal, un bonus s’appliquera pour chaque année reportée (à lire dans L’Info n°15). Néanmoins, cette mesure entrera finalement en vigueur en 2027 au lieu de janvier 2026, comme initialement prévu.

Si son entrée en vigueur est reportée, la mesure n’en reste pas moins problématique, l’impact du malus étant loin d’être neutre et surtout supporté par les travailleurs à mi-temps, qui sont majoritairement des femmes, et les personnes peu qualifiées qui ont commencé à travailler plus tôt, dans des métiers pénibles, et qui sont donc susceptibles de «s’épuiser» plus vite. Elles se heurteront au malus en cas de carrière incomplète alors que ces personnes sont plus exposées au risque d’une espérance de vie (en bonne santé) plus courte.

Par ailleurs, la première année de travail sera également prise en compte dans le calcul de la pension, ce qui aura un impact positif pour les étudiants qui trouvent du travail à l’issue de leurs études. Un «pot de cinq jours» est par ailleurs créé pour éviter qu’un travailleur perde une année complète de carrière pour une seule journée manquante. Le congé de soins, le congé de maternité, le chômage temporaire ainsi que, correction importante par rapport à l’accord d’été, la maladie seront bien assimilés à des jours effectivement travaillés.

Des ajustements marginaux

En 2026 et en 2028, un saut d’index (partiel) aura lieu, c’est-à-dire que l’indexation des pensions sera plafonnée à 2.000 euros, au même titre que les autres allocations sociales. Concrètement, si un pensionné reçoit 2.500 euros de pension, par exemple, seule une partie du montant, c’est-à-dire 2.000 euros, seront indexés. Les chefs de ménage seront donc plus impactés.

Le 25 novembre, sur les antennes de la RTBF, Marie-Hélène Ska, secrétaire générale de la CSC, est revenue sur les corrections apportées par le gouvernement aux «anomalies profondes qui étaient apparues en première lecture». «Comment peut-on introduire un malus pension et oublier qu’on peut être malade pendant sa carrière? Comment oublier que la première année où on travaille, qui débute souvent en juin ou en septembre, jamais on n’atteindra 56 jours de travail effectif? Ces corrections ont été apportées parce que nous avons pointé ces éléments», déplore Marie-Hélène Ska. «Mais, ajoute-t-elle, ces ajustements ne changent rien quant aux attaques contre le monde du travail qui continuent», en matière de flexibilité, de travail de nuit ou de pénibilité par exemple.


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