Le Mouvement ouvrier chrétien (Moc) a fêté ses 100 ans en avril dernier, à l’occasion de la centième édition des Semaines sociales Wallonie-Bruxelles. Mais qu’est-ce que le Moc et que fait-il?
Ariane Estenne, présidente du Moc
On dit parfois de lui qu’il est une sorte de paquebot dans le monde des organisations sociales belges. Son assise large – le Moc regroupe en son sein un syndicat, une mutuelle, un mouvement de citoyens et citoyennes, un mouvement féministe et un mouvement de jeunes – lui confère une force d’action incontestable et incontournable. Le Moc, par sa structure particulière à la croisée de cinq organisations issues du pilier chrétien, est une sorte d’ovni dans le paysage associatif belge. Un ovni qui traverse le temps, les époques, les enjeux tout en maintenant son cap vers un monde juste, durable et égalitaire. Cent ans de luttes pour atteindre cet objectif, ce n’est pas rien! Cet anniversaire est l’occasion de célébrer les conquêtes pour lesquelles le Moc s’est battu: le suffrage universel, le droit du travail, une protection sociale large, l’obligation scolaire, la liberté d’association, mais aussi la conquête de droits culturels, comme le décret de l’éducation permanente. Ces combats illustrent combien, pour le Moc, le progrès social est inséparable du progrès culturel et combien l’inclusion de tous les publics et la solidarité doivent être au cœur du modèle social qu’il défend.
Mais aujourd’hui, la social-démocratie (SD), dont il constitue l’un des acteurs historiques, sort affaiblie par quarante ans de politiques néolibérales avec lesquelles elle a composé, et par une crise démocratique où elle a perdu en légitimité. Pour les uns, la SD est arrivée au bout de son programme et n’a pas (encore) réussi à en recréer un nouveau. Pour d’autres, elle est en quelque sorte rattrapée par les fondements inégalitaires de son projet et les limites de ses compromis: si la social-démocratie a amélioré significativement le sort des travailleurs et des plus précaires, les droits conquis l’ont été, et demeurent en partie, pour une part seulement de la population en s’appuyant sur une logique productiviste exploitant les ressources des pays du Sud. Le temps est venu de se donner les moyens d’une réappropriation commune et d’un débat autour de la SD. C’est dans ce cadre qu’une partie de la Semaine sociale a été consacrée à ce questionnement, notamment en vue de repenser son avenir.
Le Moc est présent et actif en Belgique francophone et germanophone. Aujourd’hui, plus d’un million de personnes sont concernées par ses actions. Le Moc, c’est aussi de nombreux services mis en place pour les publics populaires: un service d’information et d’éducation populaire (Ciep), un réseau orienté vers l’émancipation professionnelle, sociale et citoyenne des publics éloignés de l’emploi (AID), un centre d’expertise en économie sociale et solidaire (Syneco) ou encore une ONG pour œuvrer à la justice sociale et l’égalité dans les pays du Sud (WSM). Ensemble, le Moc et ses organisations constitutives entament à présent une nouvelle page de leur histoire. Elles l’espèrent au moins aussi riche en conquêtes de nouveaux droits que le siècle que nous venons de traverser.
L’inclusion de tous les publics et la solidarité doivent être au cœur du modèle social.