Ali, 37 ans, travaille dans la société pharmaceutique Novo Nordisk (ex-Catalent), à Neder-Over-Heembeek (Bruxelles), comme stérilisateur dans le département Manufacturing. Particularité: il travaille le week-end et, une fois sur deux, de nuit. Il témoigne des difficultés de ce rythme de travail.
Propos recueillis par David Morelli
J’ai choisi de travailler le week-end principalement pour aider ma femme à s’occuper de nos quatre enfants. Le travail du week-end impose un horaire de jour (de 10 à 22 heures) suivi, le week-end suivant, d’un horaire de nuit (de 22 heures à 10 heures). Ce n’est donc pas un choix volontaire.
Malheureusement, il y a peu d’éléments positifs à travailler la nuit. À la fin de mon week-end de nuit, je suis fatigué tout le reste de la semaine. J’ai beaucoup de mal à récupérer. Le seul point positif, c’est qu’en commençant à travailler le vendredi soir, je termine le dimanche matin. Je peux donc avoir au moins ce jour-là pour profiter de ma famille et de mes amis… si j’arrive à tenir. Parce que j’ai quand même une nuit blanche derrière moi. Je vis de manière décalée par rapport au monde qui m’entoure.
Nous n’avons pas d’endroits spécifiquement prévus pour se détendre ou faire une sieste.
Nous avons une pause d’une heure après quatre heures de travail. On peut la prendre en une fois, ou en deux pauses de 30 minutes que l’on répartit sur la nuit de travail. Mais il n’y a pas d’aménagements spécifiquement prévus pour se relaxer, et les chaises en bois du réfectoire sont très inconfortables. Le seul endroit où se détendre ou faire une sieste, c’est sa voiture. Mais ce n’est très confortable non plus, et cela nous casse souvent encore plus. À part l’installation d’une salle de silence ou d’un espace de détente, je ne vois pas comment améliorer les conditions de travail de nuit. Mais on manque de place pour créer un tel endroit…
Nous travaillons sous air propre: les locaux doivent être propres tout le temps. Un arrêt de la production nécessiterait un nettoyage exceptionnel qui prend énormément de temps. Cela occasionnerait de gros retard de production car nous produisons en continu, même les jours fériés. Même les deux seuls jours fériés où nous sommes en congé, à Noël et au Nouvel an, la production doit continuer. Chaque année, la société doit donc trouver des volontaires pour assurer la production à ces dates. Lorsqu’un jour férié tombe un vendredi ou un lundi, je suis susceptible de travailler trois nuits d’affilée. S’il tombe au milieu de la semaine, je dois rester sur le rythme de nuit en attendant le week-end. C’est quelque chose de compliqué à gérer.
Même après huit ans, je ne me suis toujours pas habitué à l’horaire de nuit. J’ai besoin de la semaine qui suit pour récupérer de ces deux fois douze heures de travail de nuit. Peut-être qu’une personne qui ne travaille que de nuit peut s’habituer à ce rythme, mais moi, personnellement, je n’y arrive pas. Pour le reste, Dieu merci, pour le moment, je n’ai pas de problèmes de santé. Mon corps a néanmoins plus de mal à récupérer que quand j’étais plus jeune.
Je signerais tout de suite.
© David Morelli