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L'info n°1228/06/2024

Bruxelles

L’alternance au cœur des débats

En complément au dossier sur la formation en alternance en Wallonie (à lire dans L’Info n°11), L’Info aborde, avec Julie Macq, collaboratrice au service d’études de la CSC, les spécificités de l’alternance en région bruxelloise.

Propos recueillis par David Morelli

Comment évolue l’enseignement en alternance à Bruxelles?

À Bruxelles, un jeune qui veut suivre un enseignement en alternance se tourne soit vers un Centre d’éducation et de formation en alternance (Cefa), qui ressort de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), soit vers le Service formation des PME (SFPME), qui est l’équivalent des IFAPME wallons. La déclaration de politique régionale 2019-2024 mentionnait la volonté de faire de l’alternance une filière d’excellence, rejoignant les discours portés par la FWB et la Région wallonne. Afin de concrétiser cette déclaration, le gouvernement bruxellois a décidé de s’associer à la FWB et la Région wallonne pour faire un état des lieux de l’enseignement en alternance. Les travaux entrepris entre francophones n’ont cependant pas pu continuer avec Bruxelles, bien qu’il eût été préférable d’avoir une vision unie entre francophones. La région bruxelloise aura quand même mis en œuvre une petite réforme de l’alternance de son côté, se concentrant sur le SFPME.

96% des entreprises bruxelloises sont des PME. Cela rend-il plus difficile l’accès à des stages?

En 2021, presque un quart des étudiants bruxellois inscrits dans des Cefa n’avaient pas de stage. Dans les entreprises qui comptent moins de 10 travailleurs, l’encadrement des jeunes peut en effet poser des difficultés en termes de charge de travail. Afin de motiver ces PME à accueillir des stagiaires, il existe à Bruxelles la prime «tuteur». Par ailleurs, l’Office francophone à la formation en alternance (Offa) a développé une application pour faciliter le matching entre jeunes et tuteur en entreprise, application encore sous-utilisée. Plus globalement, l’alternance permet au jeune d’avoir accès à des équipements plus actualisés que ce qu’il y a parfois dans les écoles.


Les Cefa sont une part importante de l’alternance bruxelloise.

Le niveau de précarité, particulièrement important à Bruxelles, constitue-t-il un obstacle pour le développement de l’alternance?

Le système d’enseignement est extrêmement inégalitaire, et la filière est toujours vue comme une filière de relégation. Le niveau de précarité ne serait pas un obstacle pour le développement de l’alternance si elle était perçue comme une filière comme les autres. Aujourd’hui, le taux d’abandon y est important. Bien que les Cefa accueillent une proportion importante de jeunes avec un niveau socio-économique faible, ils ne reçoivent pas les aides complémentaires que reçoivent les établissements en «encadrement différencié». Le Comité régional bruxellois (CRB) de la CSC propose de refinancer les Cefa en fonction de leur public ou, en tout cas, de mieux répartir les moyens alloués dans l’enseignement.

Que propose le CRB pour améliorer l’accès des bruxellois à l’alternance?

Nous proposons, entre autres, de faire de l’instance Bassin1 le lieu de concertation du redéploiement de l’alternance. Dans la mise en place de «l’après tronc commun», nous souhaitons faire de l’alternance une modalité pédagogique plutôt qu’une filière, c’est-à-dire que l’alternance puisse être utilisée dans toutes les formes d’enseignement (général ou qualifiant). Plus globalement, le marché scolaire doit être remis en question: tant que nous fonctionnerons en filières et en «écoles ghettos», notre système d’enseignement restera profondément inégalitaire.

1. L’instance Bassin enseignement-formation-emploi (ou Ibefe) est une instance de concertation entre la Région wallonne, la FWB et la Cocof, NDLR.


© Leyla Vidal - Belpress.com

Le système d’enseignement est très inégalitaire, et la filière est toujours vue comme une relégation.