Taxis: une action collective de boycott contre Uber
Les chauffeurs de taxi bruxellois utilisant la plateforme Uber ont lancé un mouvement de boycott pour sensibiliser les utilisateurs à leurs conditions de travail. La collectivisation de la lutte avance dans ce secteur.
David Morelli
De nombreux chauffeurs se sont déconnectés de la plateforme durant certaines heures en signe de protestation.
Début septembre, des actions de déconnexion durant certaines tranches horaires ont été organisées par les chauffeurs de taxi bruxellois utilisant la plateforme Uber. Ils entendaient dénoncer l’introduction du système «TripRadar» qui, selon eux, attribue les courses à plusieurs chauffeurs en même temps, créant une compétition accrue et l’augmentation de la commission d’Uber sur les courses.
«L’arbitraire et l’unilatéralisme total de Uber est problématique. Il n’y a aucun dialogue social, affirme Martin Willems, responsable du service United Freelancers de la CSC. Or, les problèmes sont nombreux: Uber modifie régulièrement sa manière d’organiser le travail et a augmenté ses commissions. Elles étaient de 20, puis 25 et maintenant, elles sont de 35% sur les courses les plus intéressantes. Sur les courses les moins rentables, Uber envoie la course simultanément à une série de chauffeurs en les pressant de l’accepter très rapidement. Cela devient la condition pour qu’ils puissent recevoir ensuite les courses intéressantes. Les chauffeurs sont mis en concurrence. Ils en ont marre, et veulent au moins vouloir discuter avec Uber, ce qui n’est pas le cas.»
Si l’initiative de cette action vient des chauffeurs, UF les accompagne et vise des solutions plus structurelles. «Il faut aller vers de meilleures conditions de travail pour les chauffeurs, comme pour les livreurs de repas et les autres travailleurs de plateforme, affirme le responsable United Freelancers. Ils devraient bénéficier, comme les autres travailleurs, des avantages du droit du travail. Il faut un véritable engagement des autorités pour améliorer leur situation. En effet, si certaines plateformes continuent à se moquer de leurs travailleurs, c’est parce que les autorités le tolèrent».
Pourtant, une loi est en vigueur depuis le 1er janvier 2023 imposant une présomption de salariat pour les travailleurs de plateforme et tant la cour du Travail que la Commission relation de travail (CRT) ont répété que les livreurs de repas devaient être salariés. «Mais concrètement rien ne change parce que les autorités n’ont visiblement pas envie de siffler la fin de la récréation», regrette Martin Willems.
Concernant les chauffeurs Uber, la CRT a dit en 2020 qu’ils devaient avoir les mêmes droits que les autres travailleurs; à tout le moins qu’un dialogue social devait être mis en place. Pour United Freelancers, les autorités régionales pourraient aussi fixer un maximum pour la commission de l’intermédiaire ou mettre en place une plateforme publique. «Cela a été promis, mais on ne voit rien venir», fustige son responsable.
Quelle que soit l’issue de l’action, sa mise en place collective constitue un résultat visible des actions de terrain menées par United Freelancers.
«United Freelancers est maintenant largement reconnu comme un soutien essentiel de ces travailleurs précaires qui sont très dispersés et isolés. Nombre d’entre eux, qui n’avaient peut-être pas cette tradition syndicale, découvrent que l’action collective est le meilleur moyen de défendre ses droits contre un employeur puissant, même dans le monde de la toute nouvelle technologie, et quel que soit le statut du travailleur», conclut Martin Willems.
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