«Cette réforme vise à baisser les primes de nuit dans un quart de l’économie»
La réforme du travail de nuit va faire perdre jusqu’à 3.180 euros brut aux travailleurs de nuit.
D. Mo.
Le ministre de l’Emploi, David Clarinval, a annoncé son intention de limiter les primes de nuit dans la distribution. Actuellement, des primes de nuit sont payées entre 20h et 6h du matin pour compenser l’impact néfaste du travail de nuit sur la santé et la vie sociale et de famille. Les primes s’élèvent à un montant compris entre 10 et 50% du salaire selon les entreprises. Le ministre voudrait que ces primes ne soient plus payées qu’entre 23h et 6h du matin en ce qui concerne les nouveaux travailleurs.
Il souhaite aussi que la réforme s’applique à 14 commissions paritaires (lire encadré). «Ces commissions paritaires correspondent à 980.000 travailleurs, soit 23% de l’emploi en Belgique. C’est beaucoup trop large. Selon les estimations, l’e-commerce emploie 30.000 personnes en Belgique, soit 0,7% de l’emploi», commente Luc Debast, porte-parole de la CSC Alimentation et Services (A&S) pour le commerce alimentaire.
Le gouvernement a ajouté une condition: que l’entreprise réalise des ventes en lignes. «Mais c’est une condition qui n’en est pas une. Il suffit qu’une entreprise modifie son site web pour vendre certains articles en ligne. Cela ne coûte que quelques milliers d’euros. Ce critère est mauvais. Par exemple, un supermarché réalisant 5% de son chiffre d’affaires en ligne satisfait au critère. Il va faire passer progressivement la totalité de ses travailleurs dans le nouveau régime, alors que presque personne n’y travaille pour l’e-commerce. Cette réforme ne vise pas du tout à aider l’e-commerce, car il y a d’autres choses à faire pour cela, mais bien à baisser les primes de nuit dans un quart de toute l’économie».
Cette réforme ne vise pas du tout à aider l’e-commerce, car il y a d’autres choses à faire pour cela, mais bien à baisser les primes de nuit dans un quart de toute l’économie
La CSC A&S a sorti sa calculette., en prenant l’exemple d’un nouvel embauché en travail de nuit qui a des primes de nuit à 20% en plus du salaire normal. Avec la réforme, ce dernier perdrait trois heures de primes chaque nuit. Cela reviendrait à une perte de 228 euros brut par mois ou 3.180 euros par an1.
Autre exemple: dans les dépôts des supermarchés, les primes de nuit ne sont actuellement déjà payées qu’entre 22h et 6h (au lieu de 20h à 6h ailleurs), mais elles s’élèvent jusqu’à 40% du salaire de base dans certaines entreprises.
Avec la réforme voulue par le ministre Clarinval, un nouveau travailleur de nuit perdra donc une heure de prime de nuit. Cela correspond à 190 euros brut par mois ou 2.640 euros par an. «Les travailleurs et travailleuses de nuit vont perdre énormément d’argent avec cette réforme. Le gouvernement prétend vouloir mieux rémunérer le travail, mais c’est tout le contraire qu’il fait. Ces primes de nuit sont en compensation de l’impact néfaste du travail de nuit sur la santé et la vie sociale et de famille. Les études montrent que le travail de nuit augmente même le nombre de cancers», conclut Luc Debast.
1. Dans le calcul annuel, l’impact sur la prime de fin d’année et le pécule de vacances est également pris en compte.
Le travail de nuit dans l’e-commerce concernera les commissions paritaires suivantes: 100 – CP auxiliaire pour ouvriers, 119 – Commerce alimentaire, 125.03 – SCP pour le commerce du bois, 127 – Commerce de combustibles, 140.03 – Sous-commission paritaire pour le transport routier et la logistique pour compte de tiers, 149.01 – Électriciens: installation et distribution, 149.04 – Commerce du métal, 200 – CP auxiliaire pour employés, 202.01 – SCP pour les moyennes entreprises d’alimentation, 201 – Commerce de détail indépendant, 202 – Employés du commerce de détail alimentaire, 226 – Employés du commerce international, transport et logistique, 311 – Grandes entreprises de vente au détail et 312 – Grands magasins.
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