Lédito

L'info n°1907/11/2005

Se poser la question de l’utilité des subsides aux entreprises

La Banque nationale de Belgique (BNB) a publié une étude au titre évocateur: «Les subventions publiques et les aides à l’investissement sont-elles plus élevées en Belgique?» La réponse est évidente: oui. Les subsides alloués aux entreprises atteignent environ 4% du PIB, soit 12 milliards de plus que la moyenne de la zone euro. En 2019, elles étaient supérieures de 2,3 points de pourcentage du PIB à la moyenne des pays voisins. C’est bien davantage que chez nos voisins, alors que les dépenses sociales se situent, elles, dans la moyenne européenne. Selon nos calculs, en 2023, tous les flux financiers de l’État vers les entreprises s’élevaient à 20 milliards d’euros.

Le gouvernement en fait-il trop? La fiscalité sur le travail est souvent invoquée pour justifier ces aides, notamment les subventions salariales, qui en représentent la majeure partie. Pourtant, plusieurs études montrent leurs faiblesses structurelles. La réduction de cotisations pour une «première embauche» coûte par exemple très cher pour une efficacité quasi nulle. Le Bureau du Plan a lui aussi souligné les dérives de certaines aides à la recherche et au développement, souvent accordées via des réductions d’impôt des sociétés.

Pendant des années, les Régions ont maintenu un système de titres-services sursubventionné, corrigé seulement récemment. Tant que les res­ponsables politiques persisteront à déclarer qu’on ne peut «toucher à l’industrie» ou «aux entreprises», des milliards continueront à s’écouler sans évaluation ou réorientation sérieuse. La BNB plaide d’ailleurs pour davantage de transparence et une analyse approfondie de l’efficacité de ces soutiens publics.

Pendant ce temps, le gouvernement multiplie les économies sur le dos des demandeurs d’emploi, des pensionnés et des malades de longue durée, tout en laissant prospérer des aides peu ou pas efficaces. Cette ambivalence n’est plus tenable. Si l’on veut une économie juste et durable, il faut oser questionner les privilèges cachés derrière le mot «subside».

Marie-Hélène Ska, secrétaire générale

Tant que les responsables politiques persisteront à déclarer qu’on ne peut «toucher aux entreprises», des milliards continueront à s’écouler sans évaluation ou réorientation sérieuse.