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L'info n°1907/11/2005

Casser les mythes plutôt que les grèves

Durant les trois jours de l’«Appel de novembre», vous ne manquerez pas d’entendre des critiques concernant le recours à la grève. Déconstruction succinte de quatre d’entre elles.

David Morelli

«Ce sont toujours les simples citoyens qui sont les victimes d’une grève»

C’est une vision à très court terme. Les mesures du gouvernement Arizona auront des répercussions profondes et parfois désastreuses sur notre société dans les prochaines décennies. Les jeunes, par exemple, devront travailler plus dur, de manière plus flexible, tout en subissant un gel salarial et une diminution de leur pension. Ces conséquences à long terme sont bien plus lourdes que les désagréments potentiels de journées de grève.

«Les entreprises n’ont rien à voir avec cette grève, mais elles en seront affectées»

Les organisations patronales ont exercé un lobbying intense lors de la formation du gouvernement, et elles ont obtenu gain de cause. Plus de flexibilité, allongement de la carrière, gel des salaires, suppression progressive du RCC et des emplois de fin de carrière, allègement des cotisations patronales. Difficile, dès lors, de prétendre qu’elles n’ont joué aucun rôle dans les décisions qui ont abouti à ces grèves.

«Les syndicats aiment faire grève»

«La concertation sociale quand c’est possible, l’action syndicale quand c’est nécessaire». C’est la devise de la CSC. Le gouvernement Arizona évoque souvent la concertation sociale, mais elle doit se faire entre interlocuteurs égaux. Or, les organisations patronales, très favorables à l’égard du gouvernement Arizona, bénéficient largement de sa politique. Dès lors, pourquoi organiser des concertations sociales sérieuses avec les syndicats? Si le gouvernement et les organisations patronales réalisent qu’ils ne peuvent pas simplement écraser les travailleurs, nous serons beaucoup plus forts dans les négociations pour adapter les projets du gouvernement. Nous devons montrer, durant ces jours de grève, qu’ils doivent tenir compte de celles et ceux qui font tourner ce pays au quotidien.

«La concertation sociale quand c’est possible, l’action syndicale quand c’est nécessaire». C’est la devise de la CSC.

«Les grèves nuisent à l’économie du pays»

Les grèves ont effectivement un impact économique. Ce qui en fait un outil efficace. Mais les coûts ponctuels d’une grève doivent donc être mis en balance avec les progrès structurels qui résultent d’une grève. Selon une analyse de la Banque nationale de Belgique, seule une partie des pertes n’est pas récupérable. Les biens qui ne sont pas achetés/produits le jour de la grève sont souvent achetés/produits plus tard. Si les travailleurs obtiennent une augmentation salariale, celle-ci augmente le pouvoir d’achat et stimule l’économie locale. Une meilleure protection sociale réduit les coûts de l’insécurité d’emploi pour la société. À l’inverse, permettre le démantèlement des salaires, des allocations et de la protection peut représenter à terme un coût beaucoup plus élevé pour la société.


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